Comment se préserver de l’angoisse des injonctions, divisions, mensonges, menaces et autres brutalités qui bouleversent notre monde aujourd’hui ? Se couper du flot d’informations issu des médias et des réseaux sociaux n’y suffit pas. Face à la violence de notre époque, la réponse est intrinsèque. Elle se niche au cœur de la douceur qui berce la vie depuis ses origines. La douceur est une force de résistance. Comme un rempart, elle sait mettre la bonne distance vis-à-vis des inévitables agressions du quotidien. La douceur est politique. Elle n’offre aucune prise au pouvoir. La douceur est transformation. Elle réconcilie passé, présent et futur ; elle coud les mondes ensemble.

Selon le philosophe Charles Pépin, le métier d’homme est difficile et nous ne nous en sortirons pas sans la douceur : « C’est parce que la vie est dure que la douceur est nécessaire ; c’est parce que nous venons au monde inachevés, intranquilles, quasiment perdus, que la douceur est salutaire ».

Jamais autant qu’aujourd’hui, je n’ai éprouvé le besoin de brandir la douceur comme un étendard, de crier haut et fort cette paix intérieure pour qu’elle essaime mon monde, à l’extérieur. Je ressens la douceur si puissamment dans chacune de mes cellules ; son énergie réconfortante, sa puissance transformatrice font d’elle une énigme qu’il me revenait de percer, guidée par les mots d’une grande poésie de la philosophe et psychanalyste Anne Dufourmantelle, croisés avec les recherches de la journaliste Aurélie Godefroy.

Dans toutes les traditions spirituelles, la douceur relève d’un attribut de Dieu, avant d’être une vertu humaine. Tantôt élevée au rang d’état de grâce, tantôt inscrite comme fondement même de l’éthique, la douceur est féconde et porte en elle la quintessence des causes morales et politiques : la paix, le pardon, la générosité, la compassion, l’écoute, la justice…

« Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage. » Évangile selon saint Matthieu

Certes, il n’est pas toujours doux de vivre. Car la douceur ne se possède pas, elle nous visite, inspirée d’un regard, d’un geste, d’une sensation, d’une lumière… Nous la sentons là, aussi discrète, intense et vitale qu’un battement de cœur.

La douceur nait de la vie comme la vie nait de la douceur. Venue du plus loin de la mémoire de la vie, là où mère et enfant ne font qu’un, la douceur évoque un paradis perdu, un bercement.

« La douceur vient avec la possibilité de la vie, avec l’enveloppe utérine qui filtre émotions, sons et pensées, avec l’eau amniotique, avec le toucher à l’envers de la peau, avec les yeux fermés qui ne voient pas encore, avec la respiration encore protégée des agressions de l’air. Sans la douceur de ce toucher originel nous ne serions pas au monde. » Anne Dufourmantelle

Le monde de l’enfance prolonge l’expérience de la douceur. On ne survivrait pas à l’enfance sans douceur, car tout y est tellement exposé, suraigu, violent en un sens, à découvert, que la douceur en est le préalable absolu.

Dans les bras maternels, la douceur s’éprouve, elle laisse une marque indélébile, une harmonie entre caresse et fermeté, une essence que le philosophe André Comte-Sponville prête au féminin : « …c’est un courage sans violence, une force sans dureté, un amour sans colère ».

Cette faculté de tisser une relation douce à soi-même et aux autres élève la douceur au rang des plus grandes qualités existentielles que sont la sagesse et la noblesse. Dans cette harmonie que vise la douceur, elle tient compte de la cruauté et de l’injustice du monde. Pour la philosophe : « être doux avec les choses et les êtres, c’est les comprendre dans leur insuffisance, leur précarité, leur immaturité, leur bêtise ».

Selon Anne Dufourmantelle, un art illustre autrement l’intelligence inhérente à la douceur : l’art équestre. « Il suppose l’entente de l’homme et de l’animal à un haut degré de raffinement et de complicité. Il s’agit pour l’un de comprendre (de deviner, de tolérer) l’autre au point d’en être accepté. Le cheval peut être guidé, dressé, bridé, cravaché, il ne s’accordera au cavalier que si celui-ci sait trouver avec douceur la légèreté de main et le mouvement dont il s’ajustera à la foulée du cheval. Il y a dans l’équitation un art de la douceur comparable à nul autre. En cela, la douceur est une harmonie. »

L’intelligence de la douceur porte la vie, elle y laisse son empreinte subtile au gré de notre vécu ; de l’animalité, elle garde l’instinct, de l’enfance l’énigme, de la prière l’apaisement, de la nature l’imprévisibilité, de la lumière la lumière.

La douceur est une manière d’être au monde. Les êtres qui en font preuve sont des résistants dont les actes ont plus de pouvoir sur le cœur des hommes que la violence et la barbarie. Incapables de trahir comme de se trahir, leur combat est au centre de l’éthique et du politique.

« La douceur est invincible » Marc Aurèle

Oui, la douceur est politique ! Elle est une force de résistance qui s’oppose à toute tentative de contrôle. Car elle n'est ni désobéissance ni insurrection. Elle n’offre aucune prise au pouvoir ; elle est non-gouvernable. « Là où la loi commande, la douceur invite. Là où la loi menace, la douceur attire. Là où la loi contraint, la douceur engage. »

La douceur est une passivité-active. Elle ne plie pas. Sa force de résistance tient précisément à sa vulnérabilité, à son exposition à tout ce qui peut la détruire. La promesse de la douceur est aussi celle d’un retournement des pouvoirs, d’une révolution secrète. Précisément parce qu’elle ne commande pas, n’oblige pas, ne gouverne pas. Comme dans certains arts martiaux, la douceur peut retourner le mal et le défaire mieux qu’aucune autre réponse.

« Son pouvoir est immense : elle soigne les âmes blessées, elle éloigne du mal ; elle nous guérit de l’illusion de la toute-puissance. Elle nous arrache au vouloir et nous rend au désir. » Charles Pépin

La douceur ne laisse pas indemne ; elle modifie substantiellement ce qu’elle affecte. Parce qu’elle sublime la vie, la sauve, l’accroît, elle est une insoupçonnable puissance de transformation des choses et des êtres.

« Je crois que la puissance de métamorphose de la vie elle-même se soutient dans la douceur. Quand l’embryon devient un nouveau-né, quand la chrysalide laisse éclore le papillon, quand une simple pierre devient la stèle d’un espace sacré dans les jardins de Kyoto, il y a, au minimum, la douceur. » Anne Dufourmentelle

La transformation ne peut arriver que dans la douceur. Elle n’est pas possible sans l’énergie du cœur, sans le courage du désir. À l’opposé de la violence de l’effraction, de l’injonction de la norme, elle crée un espace de liberté, la bonne distance, le bon rythme, qui permet à chacun d’oser exister à sa mesure.

« Car la douceur rend possible autre chose qu’elle-même ; elle favorise tous les passages, permet toutes les transitions, les métamorphoses les plus belles. » Charles Pépin

La douceur commence par soi, l’accueil de soi. Se montrer doux avec soi est très éloigné du défaitisme, de l’inaction ou de la complaisance. Cette capacité d’autocompassion favorise une grande résilience face aux difficultés, mais aussi une meilleure aptitude à se remettre en question, accompagnée d’un désir accru de changer !

En accueillant qui nous sommes, nos sensations, nos émotions… avec douceur, nous augmentons notre qualité de présence à nous-même et devenons capables d’augmenter notre accueil de l’autre avec douceur. En accueillant la douceur en nous, nous devenons meilleurs.

Mes sources d'inspiration :
Puissance de la douceur - Anne DUFOURMANTELLE
Eloge de la douceur - Aurélie GODEFROY
Et si nous réapprenions la douceur ? - Charles PEPIN

Ce livre a été pour moi une révélation. Rien d’exceptionnel me direz-vous ; nous sommes des millions à le considérer comme un ouvrage de référence pour s’ouvrir à la pleine conscience. Plus qu’un effet de mode, n’est-ce-pas là le signe d’un besoin universel de créer un changement positif dans notre quotidien ?

Eckhart Tolle nous dévoile l’auteur de tous nos maux, la source de nos souffrances psychiques. Cette petite musique négative qui trotte insidieusement dans notre tête ; c’est notre mental. Ce refrain malsain qui tourne en boucle et s’empare de nos petits tracas tel un miroir grossissant ; c’est encore lui, notre mental. Ce bruit parasite qui hante nos jours et nos nuits et nous empêche d’accéder au royaume de notre calme intérieur ; ce sont les balivernes du mental. Tous nos problèmes sont des illusions du mental.

« La plus grande partie de la souffrance humaine est inutile. On se l’inflige à soi-même aussi longtemps que, à son insu, on laisse le mental prendre le contrôle de sa vie ».

Alors, comment se libérer de notre mental ?

Nos pensées compulsives agissent comme un épais brouillard qui nous empêche de vivre le présent. Elles nous retiennent dans le passé ou nous pressent vers le futur, ainsi pris au piège entre regrets et appréhension.

Pour se libérer du mental, il faut donc s’extraire du temps. Se réapproprier sa conscience, détourner son attention de la pensée pour la diriger vers le corps physique et énergétique. Pour expérimenter ce nouvel état de conscience, Eckhart Tolle nous invite à être présent en tant qu’observateur de notre mental, de nos pensées, de nos émotions. Devenir le témoin de ces pensées et de ces émotions permet de les reconnaître pour mieux les accepter et ainsi briser le mécanisme de résistance qui nous fait souffrir.

« Lâcher-prise est la chose la plus importante que vous puissiez faire pour amener un changement positif. »

Le lâcher-prise que préconise l’auteur cache une grande force intérieure. Il ne signifie pas endurer une situation passivement. Il permet d’accepter cette situation, en désamorçant la négativité qu’elle porte, avant de passer à l’action en toute sérénité.

Faire l’expérience du corps subtil

Lorsque vous être parvenu à faire taire votre mental, vous pouvez prendre conscience de votre corps et vous ancrer dans le présent.

« Habiter votre corps, c’est sentir le corps de l’intérieur, sentir la vie en vous… »

En maintenant son attention à l’intérieur de son corps, en le sentant vivant, en l’habitant totalement, il est possible de ressentir le champ énergétique qui vitalise chaque organe et chaque cellule. C’est le corps subtil. La clé est d’être en contact permanent avec son corps subtil pour tenir à distance le bruit du mental et éprouver une sensation profonde de paix.

Mettre en pratique le pouvoir du moment présent

Pour aller plus loin et vivre pleinement l’expérience du moment présent, Eckhart Tolle propose un livre d’exercices pratiques et de lectures méditatives : Mettre en pratique le pouvoir du moment présent. Une bonne introduction au Pouvoir du moment présent pour ceux qui ne l’ont pas encore lu.

S'épanouir sans expert ni gourou, Thierry Nadisic, chercheur à EM Lyon, docteur en comportement organisationnel et professeur agrégé, vous propose à travers ce livre une démarche d’auto-accompagnement basée sur le concept du « flourishing » ou épanouissement personnel. Thierry Nadisic vous invite à partir en voyage, celui de votre épanouissement. Pas besoin de bagages puisque toutes les ressources nécessaires sont en vous. Il vous procurera en revanche de nombreux outils de navigation.

Comme pour tout voyage, l’objectif est de prendre autant de plaisir, voire plus, à vivre le périple lui-même qu’à arriver à destination. Et surtout, l’enjeu est de trouver son propre chemin…

Avant toute chose, prendre le temps de décoder son GPS intérieur et de régler sa route sur la boussole de l’estime de soi. En bon navigateur, Thierry Nadisic n’oublie pas quelques conseils sur le choix de l’équipage, les personnes avec lesquelles vous souhaitez réaliser votre voyage et comment vous relier à elles : surfer sur la vague de la réciprocité, de l’assertivité et de l’altruisme. Lorsque vous avez largué les amarres, à vous de choisir la direction que vous souhaitez prendre. Votre vision donnera le cap. Votre moteur intérieur qu’est l’engagement, stimulé par l’autonomie et la compétence, donnera la vitesse et soutiendra le voyage dans la durée. Vous naviguerez dans les eaux troubles du mental et de l’ego, en tenant la barre bien ferme entre positif et négatif, entre optimisme et pessimisme. En cas de tempête, vous apprendrez à utiliser vos erreurs et la résilience pour reprendre la route et retrouver votre chemin.

Et ainsi, à apprécier chaque instant du reste de votre voyage.

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