A l’approche des élections présidentielles, avec la multiplication des débats entre candidats et autres interviews dans les médias, me voilà de nouveau en proie à mes vieux démons… Ces combats de mots, ces attaques qui fusent, ces allégations mensongères dont le seul objectif est de faire poser genou à terre à son adversaire, tout cela m’oppresse !
Au lendemain d’un débat très commenté entre deux candidats, j’écoutais un programme à la radio dédié au décryptage de ce qui fût, selon certains chroniqueurs : « un duel et même un combat de catch plutôt qu’un échange, entre deux adversaires qui s’interrompaient et se hurlaient dessus sans s’écouter ». Et là, incroyable, l’émission de radio a pris la tournure d’un débat dans le débat, entre une partie des journalistes considérant qu’il n’y avait pas de débat sans surjouer, sortir les poings et s’invectiver, et les autres pour qui de telles foires d’empoigne finissaient par stériliser le débat, annihiler les idées et au bout du compte contribuaient à perdre les électeurs…
Effectivement, étymologiquement, le mot débattre signifie battre, frapper, rosser avec intensité. Et sans subtilité, ni nuance aucune, c’est bien ce à quoi se prêtent nombre de nos édiles politiques, encore aujourd’hui, et de façon de plus en plus virulente, me semble-t-il.
« Si bien que le débat politique finit par s’apparenter à ces reconstitutions de joutes chevaleresques, où des cascadeurs se livrent à une démonstration d’escrime chorégraphiée en poussant de grands cris rageurs, tout en sachant qu’ils ne courent aucun danger parce que leurs épées sont émoussées. Et pendant que nous nous divertissons devant ces simulacres d’affrontements herculéens, sans cesse rejoués, il y a une chose qu’hélas, nous perdons de vue : le véritable débat d’idée. » comme le souligne Clément Viktorovitch, journaliste à France Info dans son émission Entre les lignes en décembre 2021.
Et si nous nous employions à « relever le débat » ? Façonner une parole noble, forte et utile pour donner à comprendre et faire avancer les idées. Faire preuve d’exemplarité dans notre langage en s’inspirant de virtuoses de l’art oratoire, de champions de l’éloquence, d’amoureux de la parole, qui la portent avec talent dans les prétoires… Dans cet article, je m’inspire de deux ouvrages : Remarques sur la parole de Jacques Charpentier, Bâtonnier du barreau de Paris de 1938 à 1945 et La parole est un sport de combat de Bertrand Périer, avocat et enseignant de l’art oratoire à Sciences Po et HEC.
Alors que J. Charpentier s’amuse à opposer écriture et art oratoire, il est frappant de voir combien ses écrits sont porteurs de sa parole vibrante. Lui qui enseigne que la parole est d’abord un corps en mouvement et une tension. Il nous donne à lire ici un verbe vivant, vigoureux et volontaire.
En 1961, date de la parution de son ouvrage, J. Charpentier se questionnait sur l’avenir de la parole : « En l’an 2000, les hommes parleront ils encore ? ». Il percevait alors que la parole était en voie de régression. Pour lui, l’art oratoire était déjà gagné par la maladie : « Nous ne sommes pas en présence d’un accident, mais d’une affection déjà ancienne et qui a grandi. D’abord un léger voile sur les notes hautes, un peu de laryngite. Une extinction de voix. Puis l’enroulement est devenu chronique. Et un jour, le cancer se généralise ».
J. Charpentier avait également une vision très éclairée de la déliquescence de la parole politique. Il était pour lui évident que l’éloquence politique était en chute verticale. Il constatait depuis un demi-siècle la suppression progressive du débat public. Un constat qui l’amenait à porter un regard très dur et pourtant lucide sur l’impact de cette déliquescence sur la société.
« Dans un monde qui ne s’intéresse qu’à la quantité, les combats de l’esprit ne seront plus que des batailles de chiffres. A tout propos on nous ferme la bouche avec des statistiques. Mais pour rendre les équations accessibles aux foules, on les remplacera par des graphiques, des courbes, des feuilles de température, ou des images violentes qui se graveront dans les mémoires. »
Pour être transparente avec vous, j’avais prévu de donner comme sous-titre à ce chapitre : « Le contre-exemple du débat politique d’aujourd’hui » ! J’ai finalement décidé de l’aborder sous un angle plus positif… Alors pour éviter de biaiser mon analyse, étant donné que les débats politiques actuels m’angoissent littéralement, je préfère vous partager quelques extraits du décryptage du politologue et maître de conférences à Paris II, Benjamin Morel, dont vous trouverez l’intégralité de la chronique dans les ressources en toute fin du présent article.
Il s’agit ici d’entrevoir la portée possible d’un débat politique en partant d’un cas concret, significatif de ce que la campagne présidentielle nous donne à voir. J’ai choisi cet exemple indépendamment de l’identité et du bord politique des candidats qui sont les protagonistes de ce débat. L’objectif consistant simplement à en analyser la forme au regard des enjeux électoraux.
Pour B. Morel, chacun des deux candidats, en perte de vitesse dans les sondages, a cherché à se démarquer de son adversaire en incarnant une posture opposée, en surjouant ses positions pour construire l’autre candidat comme le négatif de lui-même.
Ces postures très tranchées, voire agressives, ont donné lieu à des échanges extrêmement vifs incitant les journalistes à intervenir à plusieurs reprises pour demander aux débatteurs d’arrêter de s’apostropher. Le débat a rapidement tourné à la cacophonie avec des interruptions multiples qui ont pu avoir comme conséquence de dé-présidentialiser chacun des candidats.
Dans ce face à face, on voit clairement que la stratégie de décrédibilisation de l’adversaire adoptée par chacun des candidats, non pas sur le fond des idées mais sur la personne, a conduit à ce qu’ils se neutralisent mutuellement. D’une certaine manière, les rhétoriques qui s’affrontent conduisent à stériliser les échanges. Au bout du compte, cela perd les électeurs et pour les deux candidats, le débat est une occasion manquée.
Voilà un exemple type du discours politique comme instrument de conquête du pouvoir, tel que le dépeint B. Périer. Nous atteignons ici des extrémités qui rendent inaudible toute vision politique, à part peut-être pour les plus avertis. Comment réconcilier les citoyens avec la politique en se donnant en spectacle dans un théâtre de stratégies et de manipulations ? Pour sa part, J. Charpentier considère que toutes les maladies du langage sont des défaillances de la volonté !
Pour toucher une population, un débat ne doit-il pas rentrer dans la société ? Se plonger dans les questions du quotidien ? Aborder avec humilité les crises traversées ? Ecouter avec compassion les besoins exprimés. Explorer avec curiosité les initiatives qui fonctionnent à une petite échelle pour les diffuser à des échelles plus grandes… Porter une parole ancrée dans le réel et dans l’humain, comme l’évoque B. Périer.
J. Charpentier considère qu’il n’y a que deux manières d’apprendre à parler : Parler. Ecouter : « le premier devoir de l’orateur est de connaître – ou de deviner – la vérité de ceux qui l’écoutent. Pour que ses vérités à lui s’incorporent à eux, qu’elles deviennent leur sang et leurs muscles… ».
Telle est l’invitation de B. Périer. Pour lui, le vrai débat d’idées est une façon d’éviter les rapports de force car la violence naît de l’incapacité à confronter les points de vue et à se comprendre...
« L’écoute, plutôt que les coups. Débattre, plutôt que se battre. […] En aidant chacun à exprimer sa pensée de façon plus exacte, plus précise, plus argumentée, en bannissant les invectives et les propos rudimentaires, j’ai la conviction que l’on facilite le débat, et que l’on parvient à faire reculer les violences qui naissent de l’incompréhension. De la même façon que la parole peut diviser, elle doit aussi pouvoir nous réunir. Pas nécessairement dans le consensus mais dans le goût partagé de la controverse. »
La parole est nécessaire à la construction de liens sociaux car elle favorise la communication pour nous amener vers une compréhension mutuelle. La parole permet ainsi d’élaborer un monde commun ; elle s’inscrit dans une relation à travers laquelle chacun peut exprimer des pensées, des émotions, des valeurs, des besoins… et partager des informations, des connaissances, des intentions… En cela, la parole est un mode d’accomplissement privilégié qui nous fait exister pour soi et à travers les autres. [A lire aussi : « Cultiver son langage, c’est prendre soin de soi et des autres… »]
Pour la politologue, philosophe et journaliste Hannah Arendt, « c’est parce qu’ils peuvent parler ensemble sur ce qui les concerne tous que les hommes peuvent partager la même vie et le même monde. Le dialogue est pour elle bien plus qu’une condition de la vie en société, il est un critère majeur d’humanité ».
Parce que la voix humaine est contagieuse, pour J. Charpentier, c’est grâce à la parole que nous pouvons passer à l’action. Pour lui, la parole est action ou n’est rien. Parler, c’est faire du travail. On juge la parole à ses résultats. C’est en passant l’épreuve d’un débat qu’une idée, une théorie révélera sa force ou sa faiblesse et qu’elle mènera ou non à l’action.
Parler, ce n’est pas rien dès lors que l’on met une intention dans le langage ou que l’on partage des intentions mutuelles dans la cadre d’un dialogue. Dans la discussion, parler consiste à chercher la compréhension mutuelle, rendre explicite l’implicite, c’est une réelle entreprise coopérative.
Le pouvoir du langage c’est celui de nommer, de créer et donc de réaliser une réalité. Alors, la parole devient action dans le sens où elle vise à accomplir quelque chose. Et le vouloir dire entraîne le pouvoir agir. Tout l’enjeu est ici d’inventer des espaces pour favoriser cette parole dans laquelle on se comprend et à travers laquelle on décide de se mettre en action.
« Parler, c’est convertir. Au moins convaincre ; ou raffermir des convictions chancelantes ; ou rapprocher des divergences ; ou mettre au monde des opinions embryonnaires ; au moins répandre un sentiment, propager une disposition, jeter la graine au vent, lancer la bouteille à la mer. » clame J. Charpentier.
Dans la même veine, B. Périer convoque une parole qui part à la recherche de ce qui nous rapproche plutôt que de ce qui nous sépare. Cela suppose de se positionner honnêtement et de ne pas caricaturer la pensée de l’autre dans le débat d’idée.
Dans ce chapitre, je vous propose d’étudier trois « espaces », à inventer ou existants, pour apprendre à discuter, débattre, délibérer et surtout, pour se comprendre et faire avancer les idées. Il m’a semblé intéressant d’appréhender trois dispositifs proches dans leur philosophie et complémentaires dans les populations qu’ils adressent : la société, le monde du travail et la famille. Ces systèmes vertueux venant se soutenir les uns les autres.
Pour François Taddei, spécialiste de l’évolution de la coopération qu’il étudie à l’Inserm, et fondateur du CRI devenu Learning Planet Institute, la démocratie du XXIème siècle, si elle veut survivre et se développer, doit devenir participative à tous les niveaux, du plus local au plus global. Il propose de « déployer, à toutes les échelles, des espaces de délibération démocratique qui intégreraient dans leur structure et leur fonctionnement les piliers d’une décision éclairée : la recherche de la compréhension des faits (par la science), la formation permanente des acteurs et l’écoute des oppositions et contre-pouvoirs ».
F. Taddei imagine une démocratie fondée sur un gouvernement humble qui sait qu’il n’a pas toutes les solutions et qu’il va falloir écouter les citoyens pour coconstruire ensemble un avenir souhaitable. Une démocratie capable d’empathie, de compassion, capable d’entendre les besoins, les désirs et les peurs aussi, dans un processus ouvert et pas descendant. Pour éprouver des solutions qui satisfassent tout le monde. Il propose d’inventer de nouveaux systèmes dans lesquels nous sommes encouragés à faire émerger le meilleur de nous-même, en réintroduisant des débats de qualité et en régulant ceux qui manipulent nos émotions. Il rêve de lieux dans lesquels la culture, l’éducation, l’information de qualité et l'inspiration vont pouvoir émerger.
Un rêve qui fait écho à une invitation de J. Charpentier : « Ecouter. Chaque fois que l’occasion s’en présente. Fréquenter les églises, les palais de Justice, les universités, les Parlements. Ecouter les maîtres. Ecouter les médiocres, ne serait-ce que pour apprendre d’eux ce qu’il ne faut pas dire. Et tout en écoutant, étudier le public ».
Un autre défi est d’ouvrir le dialogue dans les organisations ! Un dialogue permanent et à tous les niveaux qui s’inscrit dans les routines de l’entreprise de manière à élaborer ensemble les bases de l’action collective.
Là encore, le dialogue dans le travail s’articule autour de deux dimensions fondamentales : l’écoute et la discussion, pour confronter les objectifs stratégiques avec les réalités opérationnelles. L’enjeu est d’ouvrir le débat au sein des équipes sur les différentes façons d’envisager l’activité et partager sur les critères du travail bien fait. En somme, créer des lieux d’expression sur l’activité dédiés à la coopération, permettant à chacun de développer son pouvoir d’agir dans une optique de résolution de problèmes. [A lire aussi : « Communiquer sur le travail, c’est bien… Communiquer dans le travail, c’est mieux ! »]
Pour coopérer, selon le sociologue Philippe Zarifian : « il faut partager la compréhension des problèmes, confronter leur analyse, se projeter ensemble dans l’avenir et anticiper les actions à mener, voire coélaborer, coécrire en quelque sorte la conception de ce que l’on doit entreprendre ensemble ».
Ces espaces au sein desquels les personnes qui travaillent peuvent faire entendre leur voix pour que les modalités de l’action commune soient mises en délibération sont les Espaces de Discussion sur le Travail, développés par l’ANACT. Cette pratique permet une discussion centrée sur l’expérience du travail et ses enjeux, les règles de métier, le sens de l’activité, les ressources, les contraintes… C’est un lieu essentiel de progrès et d’innovation, car vecteur d’apprentissages individuels et collectifs, au croisement de la performance sociale et économique.
Dans son ouvrage L’entreprise délibérée. Refonder le management par le dialogue, Mathieu Detchessahar, professeur des Universités - Laboratoire d'Economie et de Management Nantes-Atlantique (LEMNA), l'assure : « Quand il est vécu à un bon niveau de dialogue, le travail devient une véritable « école de la citoyenneté » où l’on s’entraîne à examiner des problèmes de façon partagée et critique, où l’on est invité à cultiver les vertus de la dépendance assumée : écoute, prudence, maîtrise de soi, respect d’autrui… ».
L’entreprise n’est pas en dehors de la société, elle est la société ! C’est pourquoi elle a un rôle déterminant à jouer dans l’organisation de la vie au travail. Constituée de femmes et d’hommes animés par des aspirations sociales renouvelées et portés par un élan de vivre ensemble inégalé, l’entreprise est responsable de la qualité du lien social qui s’y inscrit.
La famille est le premier système au sein duquel les jeunes enfants commencent à acquérir les compétences sociales fondamentales qui vont forger leur vie d'adulte. Pour acculturer les plus jeunes à l’art de la discussion et du débat au sein du foyer, j’ai pour ma part expérimenté les Temps d’Echange en Famille (TEF), un outil de discipline positive aux nombreuses vertus. Ces rendez-vous hebdomadaires d'une trentaine de minutes permettent aux membres de la famille d’apprendre à s’apprécier de façon positive en se remerciant et en se faisant des compliments. Un autre objectif consiste à s’aider les uns les autres, à résoudre des problèmes et trouver des solutions sur des préoccupations qui adressent parents comme enfants. Et enfin, bénéfice non négligeable de ces rencontres, elles contribuent à se faire plaisir ensemble et à planifier des activités en famille.
Mes enfants, aujourd’hui jeunes adultes, se souviennent encore de nos Temps d’Echange en Famille qui ont rythmé leurs fins de week-end pendants de nombreux mois. Je me rappelle encore de la joie que j’ai éprouvée à les voir exprimer de plus en plus facilement des manifestations de reconnaissance mutuelle et à trouver des solutions par eux-mêmes à leurs petits tracas du quotidien. Ce type d'espace est parfaitement adapté pour favoriser l'apprentissage de l'empathie et de la conversation à l'école également.
EtSiNous apprenions à fusionner nos horizons à la recherche d’une vérité partagée dans le dialogue, en société, au travail, en famille ?
EtSiNous inventions des espaces pour discuter, débattre, délibérer et faire avancer les idées, avec des chercheurs, des philosophes, des sociologues, des journalistes, des amoureux du langages et tous ceux qui se retrouvent dans ce rêve éveillé…
Quelques références pour poursuivre l'inspiration : FIGARO LIVE - Débat Pécresse/Zemmour : notre débrief FRANCE INFO - Entre les lignes - Quand le débat politique devient une joute chorégraphiée FRANCE CULTURE - Les Chemins de la philosophie - Parler, est-ce agir ? FRANCE CULTURE - L'invité(e) des matins du samedi - François Taddei : "La coopération est l'avenir de notre société" THE CONVERSATION - Portrait(s) de France(s) : où en est le débat public ? SISMIQUE Podcast - David COLON : Nos cerveaux sous contrôle
En ce début 2022, à l’heure des vœux et des bonnes résolutions, je fais le choix de me connecter à une intention forte et ambitieuse pour l’année à venir. Parce que j’ai décidé que 2022 serait l’année de l’Intention avec un grand « I ». A la tiède résolution qui « dénoue » et « défait », je choisis l’énergie de l’intention qui « intensifie » et « augmente »… Je me mets en action, guidée par les signaux qui éclairent ce changement d’année et fondent ma conviction que si nous le décidons avec force, nous avons le pouvoir de créer un monde qui nous relie, plutôt qu’un monde qui nous divise !
Et côté signaux, je me trouve plutôt gâtée… Premier signe : la parution du nouvel ouvrage du chercheur François Taddei au titre plein de promesses Et si nous ? Comment relever ensemble les défis du XXIe siècle. Un livre vital qui invite à passer à l’action et qui porte l’ambition de changer d’échelle – et de monde – de coopérer pour prendre soin de soi, des autres et de la planète. Alors que j’avais là amplement matière à élever mon intention, l’algorithme de Twitter eut la bonne idée de sélectionner pour moi un podcast de France Culture diffusé fin 2017 intitulé Nous vivons dans une société liquide, inspiré des travaux du philosophe et sociologue polonais Zygmunt Bauman.
Alors, me direz-vous, en quoi ces ressources font elles écho à mon intention pour 2022 ? Je vous répondrai en trois points : un « optimisme de la volonté » pour citer Z. Bauman, la recherche d’une éthique de la relation et le besoin de changer d’échelle pour « fusionner nos horizons ».
F. Taddei nous rappelle combien la pandémie de Covid-19 a touché l’ensemble de nos vies, à une échelle et dans une temporalité inédites dans l’histoire, en remettant en question ce qui fait de l’espèce humaine une espèce à part : nos interactions. Il forme l’hypothèse que cette pandémie restera dans les livres d’histoire comme un marqueur important de bouleversements que nous ne faisons qu’entrevoir. Selon lui, nous observons la fin d’une époque…
« Nous assistons bien à la fin d’un monde, héritier des Lumières et des révolutions industrielles, qui est caractérisé par des rapports de domination, de compétition, d’exploitation (des êtres humains et de la planète). […] De nouvelles Lumières n’adviendront pas sans que tous ceux qui y aspirent ne se mobilisent dans la durée pour réinventer des manières de vivre ensemble qui soient plus inclusives, plus équitables et plus respectueuses de notre environnement ».
Lorsque Z. Bauman se figure notre époque contemporaine, il la dépeint comme une « vie liquide », une société « en voie de liquéfaction avancée » : un monde en mouvement permanent rythmé par une accélération irrépressible, dans lequel tout est jetable et interchangeable, y compris l’Homme… Nous y sommes exposés à des flux d’information continus et parfois contradictoires qui nous contraignent au zapping et nous soumettent au risque de malentendus et de mécompréhension. Cette société liquide nous détourne de l’autre. Elle génère un épuisement et un besoin de sécurité qui nous incitent à créer de l’entre-soi.
Ce phénomène est alimenté par les politiques de séparation qui sont le lot de notre civilisation contemporaine, encore largement gouvernée par les rapports de compétition et de domination évoqués par F.Taddei. Le spectacle navrant auquel se livrent certains candidats aux élections présidentielles en est la parfaite illustration. L’espace médiatique et internet sont accaparés par ces manipulateurs qui se servent de nos peurs pour nous diviser et brandissent des discours de fracture et de clivage, mettant à mal la confiance vis-à-vis de nos institutions et de la société dans son ensemble. Dans la cacophonie de la campagne, il est difficile d’entendre les voix de rassemblement et d’unité. Notre défi est de ne pas nous abandonner aux simplismes et aux réductionnismes et d’empêcher que de fausses informations puissent s’imposer dans le débat public. Selon le « baromètre de la confiance politique » publié le 24 janvier 2022 par le Cevipof, jamais les Français ne se sont sentis aussi méfiants envers la politique !
« Face à ces récits et manipulations qui s’appuient sur un mélange de faits, de crédulité, de peurs et de perceptions de déclassement […] il faut être capable d’inventer des récits fondés scientifiquement qui redonnent de l’espoir, en s’appuyant sur notre intelligence, notre besoin de vivre ensemble et notre besoin de sens. » suggère F. Taddei.
Il cite l’historien néerlandais Rutger Bregman qui tente de démontrer, dans Humanité. Une histoire optimiste que « la plupart des gens sont bons ». Selon lui, on « fabrique ce que l’on suppose chez l’autre. […] Si nous construisons nos institutions autour de l’idée que les gens sont égoïstes, nous ne devrions pas nous étonner que les gens se comportent ainsi ». Plutôt que d’accuser le public de sotte crédulité, le chercheur propose que nous nous attachions, chacun dans notre activité, à délivrer une information qualifiée et vérifiable, sans tenter d’imposer notre vérité. Dans le même temps, il nous appartient de former les jeunes à scruter les sources fiables et à dénoncer les manipulations d’acteurs peu scrupuleux et d’algorithmes maximisant davantage la recherche du profit que celle de la vérité.
Afin de relever ces défis, F. Taddei comme Z. Bauman en appellent à notre responsabilité, individuelle et collective, de nous mobiliser pour passer à l’action.
Z. Bauman nous invite à mieux penser le monde pour mieux le transformer. Cela demande de mobiliser notre lucidité, d’aiguiser notre regard critique et d’apprendre à mieux voir pour faire que notre modernité soit la plus vivable que possible. Ainsi, le philosophe nous incite à développer notre pensée critique pour nous émanciper et sortir de ce qui nous aliène, donner la place à des micro gestes de résistance pour « renverser l’insoutenable ». Le processus révolutionnaire que revendique Z. Bauman est inspiré du philosophe et théoricien politique italien Antonio Gramsci, qui nous invite à « allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté ».
F. Taddei convient que : « … les révolutions naissent quand la somme des « je n’aime pas » devient intolérable pour un grand nombre de personnes ». Il s’inspire des œuvres du philosophe et sociologue Edgar Morin qui propose de lutter contre « les cécités de la connaissance » en combattant « l’erreur et l’illusion » qui ne cessent de parasiter l’esprit humain. Face au degré d’inconnues auquel nous confronte la période ouverte par la pandémie, « rechercher les ressources et le courage pour changer ce que l’on peut changer, la sérénité pour accepter ce que l’on ne peut changer et la sagesse pour distinguer les deux ». La sagesse s’impose ici pour enseigner la compréhension et nous mettre en posture d’apprendre les uns des autres avec humilité et empathie. A travers la pensée d’E. Morin, il introduit l’idée d’enseigner une « éthique du genre humain ».
Avec la portée inédite de la crise sanitaire et de ses conséquences socio-économiques, nous avons pris conscience que nous étions plus que jamais vulnérables et interdépendants, dans notre sphère personnelle comme professionnelle. En parallèle des personnes ayant contracté le virus, dont le nombre explose aujourd’hui avec les nouveaux variants, la pandémie a donné lieu à l’apparition de phénomènes en cascade – confinements, chômage partiel, télétravail, école à la maison… – qui ont pu être vécus comme des « rites de passage » pour reprendre l’expression de F. Taddei, amenant à cette prise de conscience de notre besoin d’entraide et de solidarité. Cette période de dérèglements a notamment permis d’entrevoir sa relation à l’autre à travers un nouveau prisme, celui du « care ». Une éthique de la relation qui a aujourd’hui largement dépassé le cadre des métiers du soin pour se diffuser plus largement dans la société et impacter les liens qui se nouent dans les organisations.
Si le « care » a été théorisé par Carol Gilligan en 1982 aux Etats-Unis ; je retiendrai ici la définition plus sociale proposée par la philosophe américaine Joan Tronto quelques années plus tard qui aborde l’éthique du « care » comme une manière de rendre le monde habitable par le soin que l’on apporte aux autres. Je trouve très évocatrice de ce que nous vivons aujourd’hui cette vision du « care » en tant qu’éthique de notre relation au monde et donc aux autres.
Entre vertu morale et geste technique, le « care » vu par le philosophe Paul Ricoeur s’apparente à une « sagesse pratique » dont la visée est de redonner une place à la vulnérabilité dans le lien social. Ici, prendre soin ne se résume pas à donner, mais cherche à solliciter la participation, le choix, et finalement l’action d’autrui. Autrement dit, le « care » est une relation entre deux acteurs – et non entre un sujet actif et un sujet passif. Avec le « care », nous offrons à l’autre les conditions d’éprouver sa dignité par davantage d’autonomie et la possibilité de s’émanciper. Pour permettre ce résultat, le « care » s’inscrit dans un processus qui va puiser dans quatre dimensions selon un principe de réciprocité.
Dans cette vision du « care » en tant qu’éthique de notre relation aux autres, nous voyons bien que la parole, le langage et le dialogue tiennent une place prépondérante pour se comprendre et se faire comprendre.
Du fait de son ampleur inédite, la crise se matérialise dans un héritage qui nous réunit. Une histoire commune dans laquelle se raconter, partager son vécu, ses repères, dire ce qui a tangué, individuellement et collectivement, et comment on s’en est sortis ensemble.
« Autant que de biens matériels et de connaissances, nous avons besoin de mots et d’enchaînement de phrases pour réorienter notre monde dans des directions plus soutenables et émancipatrices » selon le théoricien de la littérature, philosophe et essayiste Yves Citton.
Car le langage fait de nous des créateurs. En nous donnant toute latitude pour nous positionner dans l’espace et le temps, convoquer le passé et inventer le futur. Le langage nous rend libres de créer, de faire émerger de nouvelles réalités. En cela, il nous donne une responsabilité considérable, qui peut nous conduire vers le meilleur, … comme le pire. On constate un peu partout une banalisation, voire un « ensauvagement » du langage, y compris dans les sphères diplomatiques les plus civilisées. Cette radicalisation du langage pourrait fait craindre une radicalisation des actes. Car la défaite du langage, c'est la défaite de la pensée ; « à langue molle, intelligence molle ». Et le contraire est vrai : lorsque la langue n'est plus nuancée, elle se délite !
Le langage est une ambition ! Il peut être fondateur de la société en tant qu’agent de liaison, d’échange et d’intégration. Quand il se fait dialogue, il nous donne à « fusionner nos horizons », à se parler au-delà des frontières intellectuelles et disciplinaires. Prendre soin du dialogue, c’est miser sur la créativité par la différence. [à lire aussi : Cultiver son langage, c’est prendre soin de soi et des autres…]
« Si, dans mes propres travaux, je dis qu’il est nécessaire qu’en toute compréhension, l’horizon de l’un se fusionne avec l’horizon de l’autre, il est clair que cela ne signifie pas non plus une unité stable et identifiable, mais quelque chose qui arrive à la faveur d’un dialogue qui se poursuit toujours. » précise le philosophe allemand Hans-Georg Gadamer
Nous devons être vigilants vis-à-vis de ces discours qui excluent, facteurs de division, source de manipulation et de mécompréhension. Pour autant, il ne s’agit pas de refuser le conflit mais de l’institutionaliser, de le rendre possible autrement que de façon violente. En réinventant des lieux pour se rencontrer, partager des savoirs, faire émerger des débats de qualité et inspirants.
Z. Beuman y voit des sphères de « générosité intellectuelle » dans lesquelles nous créons des communs ; nous nous mettons au point sur le monde que nous voulons construire et façonnons ensemble des solutions à notre échelle. Ces « panthéons vivants » que souhaite démocratiser F. Taddei, mettent en « coopétition » toute vérité humaine en reliant les champs du savoir à toutes les échelles. Passer du local au global nécessite pour lui de connecter celles et ceux qui ont des aspirations, des émotions, des rêves communs. Créer un « GPS des rêves » qui indiquerait comment réaliser nos rêves et avec qui. Et passer ainsi du rêve (personnel) à l’utopie (collective), en favorisant l’émergence de collectifs capables de faire ensemble des choses qu’une personne ne saurait faire seule…
Quelques références pour poursuivre l'inspiration FRANCE CULTURE - L'invité(e) des matins du samedi - François Taddei : "La coopération est l'avenir de notre société" FRANCE CULTURE - Conférences - Nous vivons dans une "société liquide" CAIRN.INFO - L'éthique du care. Une nouvelle façon de prendre soin
J’aimerais apporter un éclairage sur une capacité vitale pour tout individu dans sa vie personnelle comme dans sa vie professionnelle : la confiance. La confiance peut tout changer, selon si vous la ressentez ou pas… Elle est, selon moi, un véritable marqueur de notre société. Car la confiance est au cœur des besoins exprimés aujourd’hui, individuellement et collectivement, pour réduire l’incertitude dans notre société et donc le sentiment de risque, et ainsi, permettre à chacun de se projeter sereinement vers un futur qu’il envisage comme possible.
La confiance a pris une dimension toute particulière dès les premières semaines de la crise sanitaire. Dans les entreprises, elle s’est trouvée exacerbée par la nécessité pour les dirigeants et les managers de déployer le travail à distance en responsabilité, en limitant les moyens de contrôle. Dans la société toute entière, elle s’est vue questionnée au regard des nombreuses inconnues qui ont jalonné l’évolution de la pandémie et des décisions prises par le gouvernement pour tenter d’en limiter les effets sur la population. Force est de constater que la confiance ne va pas de soi… Elle n’est pas quelque chose que nous devons considérer comme acquis une fois pour toutes. C’est une œuvre que nous devons consolider, chérir et préserver soigneusement. La confiance est un choix !
Dans le contexte des élections présidentielles, nous voyons chaque jours les dégâts causés par les postures de méfiance, voire de défiance, développées par certaines personnalités politiques, car elles génèrent une véritable crise de confiance vis-à-vis de nos institutions et de la société dans son ensemble. Un fléau que nous avons la responsabilité d’enrayer tant il nous entraîne dans un engrenage délétère et nous enferme dans une vie étriquée, cynique et insatisfaisante. Nous devons prendre conscience que chercher à obtenir des résultats en détruisant la confiance est une stratégie court-termiste car elle s’avère insoutenable dans le temps…
« La confiance est partie intégrante de la trame de notre société. Nous comptons sur elle. Nous la tenons pour acquise jusqu’au moment où elle est altérée ou détruite. Nous réalisons alors, dure prise de conscience, que la confiance est sans doute aussi vitale pour nous que l’est l’eau pour un poisson. Sans confiance, une société se désintègre et finit par imploser. » Stephen M.R. Covey
Fort heureusement, comme toute capacité humaine, la confiance se cultive. Il est à la portée de tout un chacun d’apprendre comment établir, accorder et restaurer la confiance autour de soi. Une « confiance intelligente », synonyme de discernement, moteur de l’action et catalyseur de la relation !
Dans son ouvrage « Le pouvoir de la confiance, l’ingrédient essentiel de l’épanouissement et de la performance », Stephen M.R. Covey, l’homme d’affaires et conférencier américain évoque une « économie de la confiance » à travers une formule simple qui fait de la confiance une variable tangible et quantifiable. Sa formule est basée sur une idée décisive : la confiance affecte toujours deux facteurs, la vitesse et le coût. Quand la confiance baisse, la vitesse baisse aussi et le coût augmente. Quand la confiance augmente, la vitesse augmente aussi et les coûts décroissent.
« L’impact pratique très tangible de l’économie de la confiance se mesure dans beaucoup de relations, dans beaucoup d’interactions, où nous payons un impôt masqué de basse confiance sans même nous en apercevoir ! »
Selon Stephen M.R. Covey, cet impôt basse confiance ne se limite pas à l’activité économique. Il est perceptible dans tous les secteurs, dans toutes les relations, interactions, communications, dans chacune de nos décisions, bref dans tous les aspects de la vie. Dans une entreprise, une confiance élevée améliore la communication, la collaboration, l’exécution, l’innovation, la stratégie, l’engagement, les partenariats et les relations avec toutes les parties prenantes. Dans notre vie personnelle, une confiance élevée améliore nettement notre enthousiasme, notre énergie, notre passion, notre créativité et la joie dans nos relations avec la famille, les amis et la communauté. De toute évidence, les dividendes de la confiance ne se limitent pas à une augmentation de la vitesse et de la rentabilité ; ils se retrouvent dans une satisfaction accrue et une meilleure qualité de vie.
Ce livre vous donne une paire de « lunettes pour la confiance » car pour la plupart des gens, la confiance est une variable invisible. Ils n’ont pas conscience de son impact dans nos relations et notre épanouissement. Mais une fois qu’ils ont chaussé les « lunettes de la confiance », ils détiennent la clé qui va améliorer aussitôt leur efficacité dans tous les domaines.
La confiance est une forme supérieure de motivation et d’inspiration. Rien n’est aussi puissant que l’influence de la confiance quand elle se propage.
Nous avons tous été soumis un jour ou l’autre à des situations de manque de confiance : contrôle tatillon, jugement, rétention d’informations, suspicion… Et nous avons pu éprouver les effets négatifs de ces comportements sur notre engagement, notre enthousiasme, notre créativité et sur le déploiement de notre énergie. A l’inverse, dans des situations où la confiance nous a généreusement été accordée, nous avons pu nous montrer inspirés, libérant le meilleur de nous-même.
Pour créer un environnement de confiance optimal, dans votre famille comme dans votre cadre professionnel, il est bien sûr nécessaire d’être digne de confiance et de savoir construire des relations confiantes à tous les niveaux. Mais c’est votre capacité à « faire confiance » qui est le facteur décisif.
Pour Stephen M.R. Covey : « Accorder sa confiance aux autres régénère l’élan intérieur, aussi bien le leur que le nôtre. Cet acte touche et éclaire la propension innée que nous avons tous à faire confiance et à nous montrer dignes de confiance. La confiance apporte le bonheur dans les relations, les résultats dans le travail et la foi dans la vie. »
Pour apprendre à placer judicieusement sa confiance et développer une « confiance intelligente », deux qualités sont nécessaires : une propension à la confiance et une capacité d’analyse.
Une faculté d’analyse élevée alliée à une forte propension à faire confiance permettent de développer l’intuition nécessaire à un jugement lucide et sage. Cette capacité à la « confiance intelligente » est littéralement effervescente ! Elle stimule une dynamique qui fait émerger sans cesse de nouvelles possibilités.
A l’image d’une onde circulaire à la surface de l’eau, qui se propage de l’intérieur vers l’extérieur par vibrations, la confiance est une force qui se déploie en nous selon cinq vagues. Elle commence au niveau individuel, se propage à nos relations, s’étend à notre cadre professionnel, aux relations professionnelles hors entreprise et jusque dans nos relations sociales en général. La confiance reflète cette approche de « l’intérieur vers l’extérieur » : pour construire la confiance avec les autres, nous devons commencer par nous-mêmes.
1ère vague : la confiance en soi
Le principe de crédibilité
La première vague concerne la confiance que nous avons en nous-même – dans notre aptitude à nous fixer et à atteindre des objectifs, à tenir des engagements, à mettre en accord nos paroles et nos actes – ainsi que la confiance dans notre capacité à inspirer confiance aux autres. L’idée est de devenir pour nous-même comme pour autrui une personne digne de confiance.
La confiance en soi repose entièrement sur la crédibilité, de la racine latine credere, « croire », c’est-à-dire sur votre capacité à développer 4 fondements qui vous rendent crédible à vos propres yeux comme aux yeux des autres :
2ème vague : la confiance relationnelle
L’importance de l’attitude
La confiance relationnelle est centrée de A à Z sur l’attitude… la cohérence de votre comportement. Le principe-clé qui sous-tend cette vague est un comportement cohérent, à savoir la maîtrise du langage et des attitudes adaptées pour instaurer et développer la confiance.
Comme je l’ai évoqué dans mon article [ Cultiver son langage, c’est prendre soin de soi et des autres… Pour tisser des liens sincères et durables ] Parler le langage de la confiance, c’est construire une éthique du dialogue ; un dialogue fondé sur le respect et la dignité de chacun. C’est aussi concevoir le langage comme un agent de liaison, d’échange et d’intégration plutôt qu’un facteur de division. Cette éthique du dialogue ne se résume pas à un simple échange de paroles. Elle suppose que l’on respecte certaines règles, comme être de bonne foi, écouter, accepter l’objection, être prêt à reconnaître ses erreurs… Car le langage de la confiance doit permettre la recherche d’une vérité partagée dans le dialogue.
Selon Stephen M.R. Covey, 13 attitudes améliorent sensiblement votre capacité à instaurer la confiance dans toutes vos relations, aussi bien personnelles que professionnelles :
3ème vague : la confiance organisationnelle
Le principe d’intégration
La confiance organisationnelle montre comment les leaders peuvent susciter la confiance dans tous types d’organisations et d’équipes. Le principe-clé qui sous-tend celle-ci est l’intégration.
La priorité pour tout dirigeant ou manager est de s’attacher à instaurer la confiance en soi et la confiance relationnelle autour de lui, et bien entendu à obtenir la confiance de ses équipes. Pour favoriser la confiance organisationnelle, il doit s’employer à piloter sa structure, sa stratégie, ses processus en s’appuyant sur les 4 fondements et les 13 attitudes que nous venons d’appréhender dans les deux premières vagues. Il s’agit ici d’intégrer les méthodes qui développent la confiance dans tous les rouages de l’organisation.
Procédures bureaucratiques, règles pointilleuses ou inéquitables, attitude inadaptée d’un dirigeant sont autant de symboles, de représentations d’une culture d’entreprise, et de ce qui ne fonctionne pas dans une organisation. Il convient donc pour les responsables d’harmoniser l’organisation et ses méthodes avec les principes qui développent la confiance.
Et, dans votre entreprise, dans votre organisation à vous, qu’en est-il des symboles ? Quel message adressent-ils à vos collaborateurs en interne ? Ces symboles sont-ils en accord avec les principes qui créent un haut niveau de confiance ? Et quels sont les résultats ? Pour améliorer l’intention organisationnelle, assurez-vous que votre mission et vos valeurs reflètent des motivations et des principes qui permettent de bâtir la confiance.
4ème vague : la confiance du marché
Le principe de réputation
La confiance du marché se joue tout entière sur la marque ou la réputation. Elle repose sur un sentiment : celui qui va vous faire acheter des produits ou des services, investir votre argent ou votre temps, ou recommander cette marque à vos relations.
La confiance du marché concerne des acteurs extérieurs. Il s’agit des fournisseurs, des distributeurs et des investisseurs ou des clients, mais le plus simple à ce stade pour vous c’est de les considérer comme vos « clients ».
Si une organisation renforce ses quatre fondements et adopte les treize attitudes avec ses clients, elle sera capable d’accroître sensiblement la valeur de sa marque. Ces fondements et ces attitudes sont les clés de la construction de la crédibilité et de la confiance sur le marché. Et, n’oubliez pas : la confiance que vous serez capables de créer dans votre organisation et sur le marché résultera de la crédibilité que vous aurez d’abord créée en vous-mêmes.
5ème vague : la confiance sociétale
Le principe de la contribution
Une société à confiance élevée est une société d’abondance dans laquelle chacun a plus de choix et de possibilités. L’axiome n° 1 de la confiance sociétale est la contribution. C’est l’intention de créer de la valeur plutôt que d’en détruire, de donner plutôt que de prendre, qu’il s’agisse d’individus qui cherchent à se rendre utiles ou de grandes sociétés qui acceptent de servir non seulement leurs actionnaires, mais toutes leurs parties prenantes à travers leur visée humanitaire ou sociale.
L’essentiel des contributions qui donnent leur âme à nos sociétés est le fait d’individus ordinaires qui, un peu partout dans le monde, apportent leur pierre à l’édifice commun.
Comme nous le confie Stephen M.R. Covey : « C’est vous et moi qui prenons la décision consciente de valoriser et d’investir dans le bien-être des autres. C’est vous et moi qui répercutons cette décision dans tous les aspects de notre vie. »
Nous voyons avec cette cinquième vague combien la confiance rayonne à partir de l’estime de soi, avant de se propager à nos relations, à nos organisations et puis au marché, pour s’étendre à la société dans son ensemble. La citoyenneté est un choix individuel qui engage une vie entière. Et quand nous faisons ce choix dans notre vie, nous incitons celles et ceux avec qui nous travaillons et vivons à faire des choix aussi positifs dans leur propre vie. Ensemble, nous bâtissons des organisations et des familles qui contribuent au bien-être du monde.
Le besoin de trouver du sens dans son activité professionnelle peut s’exprimer à différents moments de notre vie. Il est très prégnant auprès des jeunes générations qui aspirent de plus en plus à choisir une voie en accord avec leurs valeurs. La question du sens peut également se poser face aux difficultés rencontrées dans le cadre du travail ou à certains moments charnières de l’existence : la crise de la quarantaine, le départ des enfants... Elle n’épargne pas non plus certaines personnes qui ont tout réussi dans leur vie professionnelle et ressentent soudain un besoin de motivation supplémentaire, comme de s’aligner avec de nouveaux challenges.
« La question se pose tout au long de notre vie professionnelle, au moment de notre orientation ou en début de carrière, mais aussi à chaque évolution professionnelle, qu’elle soit voulue ou subie, et de manière plus aigüe lorsque nous ressentons une grande insatisfaction dans notre travail » précise Marguerite Chevreul dans son ouvrage Ta vie est une mission.
Ces questionnements se sont encore accélérés avec la crise sanitaire que nous venons de traverser et les bouleversements qu’elle a suscités à travers l’émergence d’une quête de sens inégalée.
Si ce besoin de sens, inhérent à notre nature humaine, est particulièrement fort aujourd’hui, c’est vraisemblablement parce que beaucoup d’entre nous n’ont jamais pris conscience de l’importance de se connecter à leurs ressources profondes, de connaître leurs talents innés, leurs capacités à réaliser quelque chose dans quoi ils se sentent utiles et qui les rendent uniques. Car nos capacités sont des trésors qui ne demandent qu’à être découverts !
Faire émerger ses talents est essentiel ; c’est une source de joie et d’épanouissement personnel car ils sont une composante importante de l’estime de soi. C’est un véritable cercle vertueux : plus nous exerçons nos talents, plus nous réussissons, plus nous sommes confiants, plus nous osons les développer encore, et plus nous sommes épanouis. La prise en compte de nos talents est donc essentielle dans nos choix professionnels car elle nous aide à déterminer si nous sommes épanouis ou pas dans notre activité.
Cette responsabilité incombe naturellement à tout individu au travail, comme elle peut être assumée par l’organisation elle-même, qui, en challengeant les aspirations personnelles de ses collaborateurs, leur permet de s’illustrer sur des capacités nouvelles à travers de nouveaux rôles par exemple, favorisant ainsi le développent de la polyvalence, de l’engagement et d’une performance durable. Pour nombre d’entre-nous, trouver sa juste place se décline au pluriel et nécessite de se déployer à travers différentes activités, d’exprimer plusieurs talents, de croiser plusieurs disciplines, d’hybrider les champs de compétences...
Dans cet article, je vous propose une chasse aux trésors, une plongée dans les profondeurs de vos capacités, à travers l’éclairage de deux ouvrages très inspirants : Ta vie est une mission de Marguerite Chevreul et Eloge des métiers hybrides d’Audrey Chapot.
Comme nous le rappelle Audrey Chapot : « Anthropologiquement, nous, êtres humains avons besoin de nous réaliser individuellement ; nous avons aussi besoin de contribuer au groupe, d’être utile pour le collectif, de faire notre part pour la communauté. L’activité professionnelle est à notre époque la manière la plus fréquente et la plus évidente de contribuer socialement ».
Notre travail fait partie intégrante de notre vocation humaine. Il est le premier lieu où nous développons nos talents, pas seulement pour nous mais pour participer à une œuvre de création. Dans son ouvrage, l’auteure souhaite réhabiliter la noblesse du métier, celui pratiqué par nos ancêtres qui combinaient de nombreux rôles car ils maîtrisaient un large éventail de savoir-faire artisanaux, en général très pointus, transmis de génération en génération. Au fil des années, avec l’apparition de la production industrielle, la notion de « travail » a pris le pas sur les métiers, avec une fragmentation des activités professionnelles et le développement d’une hyperspécialisation qui a conduit inévitablement à la perte d’autonomie des individus. Cette hyperspécialisation, bien que favorisant l’intégration de la personne qui travaille à une famille de spécialistes et sa reconnaissance par une communauté de pairs, le réduit également à une simple étiquette. Une étiquette qui peut aussi l’enfermer et la maintenir à distance de ses capacités profondes.
C’est là qu’A.Chapot introduit la question de l’hybridation, en partant d’un constat : « Nombreux sont ceux qui savent faire beaucoup plus que ce que nécessite leur poste. Professionnellement, ils se sentent en sous-régime, limités par leur champ d’action, en manque de sens, et s’en épuisent. Ils se questionnent sur les raisons de ce mal être et de leur insatisfaction chronique. Ils en souffrent pudiquement. Ils vaquent désespérément vers un type d’activité qui les nourrisse suffisamment. Leur quête les guide souvent vers une évolution de poste ou une reconversion. Ils espèrent simplement une activité qui les satisfasse pleinement, où leur potentiel sera mobilisé ».
Si elle n’est pas la norme dans beaucoup d’organisations encore très silotées, l’hybridation des talents est une réalité pour nombre d’individus qui s’y développent. Elle se matérialise à travers quatre qualités : le besoin de diversité, l’appétence de la nouveauté, la stimulation à explorer et la connaissance approfondie de plusieurs domaines. L’hybridation a ainsi la double vertu de nourrir chaque personne qui se voit, de fait, reconnue dans la diversité de ses talents et dans sa singularité, et d’enrichir son activité professionnelle. L’hybridation se traduit donc par :
Bien souvent, l’hybridation de nos talents et de nos capacités se révèle au fil des années et de nos expériences professionnelles. Elle se construit souvent avec ce qui est à disposition et des croisements de compétences inattendus. Elle émerge ainsi imperceptiblement, puis elle nous embarque, suscitant un enthousiasme débordant à être et à faire !
Comme l'évoque A.Chapot : « Les pièces du puzzle sont là, prêtes à s'emboiter pour constituer une identité professionnelle qui fait de plus en plus sens. [...] Ce qui importe est de faire un premier pas, puis un second, et ainsi de suite... Il s'agit de créer ses propres expériences, sa mosaïque, son hybridation, pas à pas. Il s'agit de se trouver ou au contraire de se perdre, plutôt que de se mouler ».
Dès notre plus tendre enfance, nos parents et nos enseignants, et par la suite nos dirigeants et managers, nous ont engagés à progresser en insistant sur nos manques et nos limites. Une vision négative qui a eu bien souvent pour conséquence de nous forger des croyances limitantes et de développer un regard très sévère sur nous-même. Par ailleurs, nous avons plus facilement tendance à voir les talents des autres, en cherchant à leur ressembler, plutôt que d’être attentif à nos propres talents.
Selon M. Chevreul, la meilleure façon de découvrir nos talents est de rechercher des exemples de nos réalisations significatives : « Il s’agit de recenser des actions dont nous sommes légitimement fiers – des pépites dans notre parcours – et que nous avons été heureux d’accomplir, que ce soit dans notre vie professionnelle ou dans nos activités personnelles ou associatives ».
A travers ce récit de nos actions marquantes, nous pouvons identifier quels sont les talents qui se sont révélés. Bien souvent, ces forces se répètent d’une action à l’autre. Nos talents sont là, ils se manifestent dans nos réussites et dans le plaisir que nous avons éprouvé à réaliser ces activités. Demander des feedbacks à sa hiérarchie, à ses collègues ou à ses collaborateurs, peut également nous apporter des indications complémentaires sur ce qui est apprécié dans notre contribution à l’organisation.
Pour sa part, A. Chapot propose d’imaginer notre propre archipel, en faisant émerger des îles correspondant à nos talents et capacités ; en imaginant comment ces îles peuvent être reliées les unes aux autres, leur propre écosystème, ce à quoi elles nous invitent… Considérer notre activité professionnelle comme un archipel permet de la réguler et de l’ajuster à l’envi, en jouant sur les variables, les frontières et ce que nous en faisons. « Libre à chacun de renoncer à des savoir-faire, d’en ajouter de nouveaux, d’en approfondir certains, ou d’investir de nouveaux champs d’activité. […] Notre archipel est notre signature unique et modulable. »
La prise en compte de nos talents dans nos choix professionnels est essentielle pour que nous puissions nous épanouir dans notre activité : « Être dans son élément, c’est changer d’état de conscience, être sur une fréquence en totale résonnance avec ce qui est juste pour vous ». Pour trouver la « fréquence juste » et reconnaître si notre activité professionnelle est en pleine résonnance avec nos talents et capacités, nous pouvons nous fier aux signaux suivants :
Si la recherche de nos talents est déjà en soi une activité qui nous apporte de la joie, plus encore, ce sont nos talents eux-mêmes qui sont source de joie car ils sont une composante de l’estime de soi qui nous est essentielle. M. Chevreul nous invite donc à éprouver de la gratitude vis-à-vis de nos talents, à savoir :
Pour M. Chevreul, la joie grandit lorsque l’on utilise et développe nos talents : « Plus nous exerçons nos talents, plus nous réussissons, plus nous sommes confiants, plus nous osons les développer encore, et plus nous sommes épanouis. »
Cette plénitude que nous procure le développement de nos talents et capacités produit une forme d’enthousiasme selon A. Chapot : « Un carburant infini, une force qui nous donne des ailes et nous permet de tout envisager et de tout accomplir. […] Il facilite les apprentissages, il accélère la maîtrise de la compétence, il nous stimule, il nourrit notre légitimité ».
Toutes deux nous invite donc à OSER ! « Oser bousculer les règles du jeu, oser faire, oser changer la donne. Oser s’accepter et accepter ce qui se présente. Oser se faire plaisir aussi. S’autoriser à concrétiser et matérialiser ce qui nous enthousiasme. »
Il convient donc de défaire ce qui ne nous convient pas pour faire ce qui nous inspire. Pour cela, plusieurs possibilités s’offrent à nous :
En se fixant comme intention suprême d'être « épanoui, dans le sens d'être régulièrement et suffisamment nourri. C'est une voie de liberté. [...] Ce n'est pas uniquement bon pour soi-même, c'est bon aussi pour la société dans laquelle nous vivons ! [...] Ce sont nos actions et nos engagements individuels qui amorcent les évolutions de la société. [...] Oser, c'est aussi ne pas attendre que la société fasse d'abord. C'est proposer un nouveau regard, initier une ouverture, faire sa part ».
Pour compléter avec quelques lectures inspirantes CAPITAL - Et si cumuler plusieurs métiers était la clé pour s'épanouir dans sa vie professionnelle ? HBR - Se manager soi-même CADREMPLOI - CV : faut-il un profil T-shaped pour se distinguer en 2021 ?
Lorsque vous vous apprêtez à partir travailler le matin, ou avant un rendez-vous important, vous prenez soin d’ajuster votre coiffure ou votre tenue, d’un rapide coup d’œil dans le miroir… Juste pour vérifier que votre apparence et votre allure sont adaptés à votre programme de la journée. Et bien pour l’intention, c’est pareil ! Avant de prendre la parole ou en prévision de l’animation d’une réunion ou d’un rendez-vous, prenez-vous soin de vous aligner avec votre intention ? En d’autres termes, vous posez-vous la question de ce qui fait sens pour vous, de ce qui vous met en action, jour après jour ? Si on va plus loin sur l'intention, avez-vous conscience de la volonté profonde qui vous anime et guide votre vie, votre raison d'être ?
Mon premier contact avec l’intention s’est manifesté il y a une quinzaine d’années lors d’une formation au management particulièrement inspirante à laquelle tous les managers intermédiaires de mon organisation participaient. Il s’agissait des prémices de l’équicoaching, à savoir, à partir de l’éthologie équine - l’étude du comportement des chevaux - apprendre à communiquer avec le cheval. Cette expérience a été extrêmement marquante pour moi, comme pour tous les participants d’ailleurs ! Seule face au cheval, au milieu du manège, les yeux de tous mes collègues rivés sur moi, la consigne consistait à communiquer au cheval mon intention de le mettre en mouvement, sans prononcer le moindre mot... Autant vous dire que ça n’a pas été chose aisée ; mais après de nombreux efforts, le cheval a fini par bouger. J’ai compris, bien des années plus tard, pourquoi le cheval n’avait pas été immédiatement sensible à l’intention que je lui exprimais alors. J’ai saisi que cette intention ne pouvait pas être lisible pour le cheval car j’étais moi-même, tiraillée entre deux intentions ambivalentes : la première, ma priorité en réalité, consistant à réussir l’exercice devant mes collègues et la deuxième étant effectivement de faire bouger le cheval. Il est clair que le cheval ne se sentait pas concerné par ma première intention !
Dans mes accompagnements individuels, lorsque je refais l’histoire de l’échec d’une communication, d’une réunion inefficace, d’un défaut d’engagement d’un collaborateur sur sa mission…, dans la majorité des cas je décèle un manque de clarté sur l’intention de mon interlocuteur, voire la cohabitation de deux intentions ambivalentes qui viennent brouiller les pistes du message délivré ou de la décision à prendre. J’ai donc décidé d’inviter systématiquement les personnes que j’accompagne à clarifier leur intention et je constate que cette pratique produit de fabuleux résultats en termes de prise de conscience, d’enthousiasme et de pouvoir agir. « C’est de la folie ! », a déclaré récemment une responsable RH suite à notre échange…
Concrètement, de quoi parlons-nous lorsque nous évoquons notre intention ? Dans son ouvrage : Le pouvoir de l’intention, Wayne Dyer, docteur en psychologie et psychothérapeute américain, désigne l’intention comme « un but ou un dessein clairement affirmé, accompagné de la détermination à obtenir le résultat désiré ». Pour lui, l’intention est une force que nous portons tous en nous, un champ d’énergie qui se déploie au-delà de nos repères habituels. Cette puissante énergie que nous ressentons lorsque nous sommes inspirés… L’énergie de l’intention nous propulse vers notre potentialité à vivre une vie pleine de sens.
L’intention ne se trompe jamais. Encore faut-il l’activer ! Pour ce faire, nous devons apprendre à identifier comment nous créons, à notre insu, nos propres obstacles à l’atteinte de notre intention. Notre façon d’envisager la vie est essentiellement fondée sur ce que nous croyons mériter et être capable d’accomplir, ou encore le résultat d’une influence extérieure comme notre famille, notre communauté… En conséquence, nous devons modifier nos pensées réflexes focalisées sur « ça a toujours été comme ça » ou « voilà ce que l'on attend de moi », influencées par ce petit compagnon qui ne nous quitte jamais d’une semelle : notre ego. Nous devons prendre conscience que l'intention est un pouvoir avec lequel nous pouvons entrer en contact, non quelque chose que notre ego doit accomplir. Et éliminer de nos pensées les conditions préalables, les limitations et les possibilités d'échec.
Selon W.Dyer : « En bannissant le doute et en faisant confiance à votre intuition, vous devez dégager un espace qui permet au pouvoir de l’intention de s’infiltrer en vous ».
Comme nous y engage W.Dyer : « Chacune de vos pensées possède une énergie qui peut soit vous renforcer, soit vous affaiblir. De toute évidence, il convient d’éliminer les pensées qui vous affaiblissent, puisque ces pensées sont des obstacles qui vous empêchent de vous accorder avec votre intention ».
Pour cela, il faut cesser de s’identifier à notre ego et atteindre un niveau de conscience qui rend les choses possibles. L’ego est la représentation que nous avons de nous-même. Il donne une vision de ce que nous croyons être et pas de ce que nous sommes en réalité. L’ego nous ramène à nos croyances limitantes et agit ainsi sur notre mental en prenant le contrôle de nos pensées, raisonnements, émotions, désirs… Quand nous éprouvons du stress et de l’anxiété, nous pouvons être assuré que c’est le jeu de notre ego. Le stress est la conséquence d’un affaiblissement du lien qui nous unit à l’intention. En étant de mauvaise humeur, nous demeurons dans un champ d’énergie qui oppose de la résistance à tout changement positif. Le stress et l’anxiété n’étant que des effets secondaires de cette résistance. Chacune de nos pensées possède une énergie qui peut soit nous affaiblir, soit nous renforcer ; à nous de faire peser la balance du bon côté de l’énergie ! Nos émotions sont donc un excellent baromètre pour détecter nos résistances et évaluer notre capacité à connaître le succès.
Pour sortir de l’emprise de l’ego et atteindre un niveau de conscience qui nous permet d’être connecté à notre intention, W. Dyer nous propose cinq voies à travers lesquels nous projeter dans la vie :
« Vous ferez ainsi la connaissance d’un monde qui souhaite votre réussite au lieu d’un monde qui conspire contre vous. »
« Le secret pour concrétiser tout ce que vous désirez tient à votre volonté et à votre capacité à vous réaligner afin que votre monde intérieur soit en harmonie avec le pouvoir de l’intention. Ce dernier attend simplement que vous fassiez le premier pas. »
« Pour réussir à manifester une idée dans votre réalité, vous devez être prêt à faire un saut dans l’inconcevable, puis à retomber sur vos pieds, en contemplant non pas ce qui vous manque, mais ce que vous souhaitez obtenir. »
« Vous devez croire que vous avez reçu tout ce dont vous avez besoin […] et vous traiter vous-même comme si vous étiez déjà la personne que vous aimeriez devenir. »
« Commencez à vivre pleinement le seul moment qui est réellement le vôtre : le moment présent ! »
W. Dyer nous invite à sentir l’intention, à entrer en contact avec elle, la connaître et lui faire confiance : « L’intention est une prise de conscience intérieure que nous ressentons explicitement comme telle, même si nous ne pouvons la décrire adéquatement avec des mots ».
Comme je le soulignais au début de cet article, s’aligner avec son intention demande un entraînement quotidien. En étant à l’écoute de ses émotions, chaque jour est l’occasion de s’accorder un peu plus avec son intention, de la nourrir de « petites intentions » qui vont contribuer à construire sa raison d’être. Chaque matin, projetez-vous sur l’intention à travers laquelle vous avez envie de vivre votre journée ; appréhendez votre programme, vos rencontres, en capitalisant sur les émotions positives que vont générer ces moments.
« Lorsque vous êtes suffisamment éveillé pour vous interroger sur votre raison d’être et vous demander comment la définir, c’est le signe que vous êtes inspiré par le pouvoir de l’intention. »
Vous l’avez bien compris, se connecter à son intention requiert de la discipline. Autant que possible, cela nécessite de simplifier sa vie en se débarrassant de ses pensées limitantes pour repousser les frontières de sa réalité. Et ainsi, être en mesure de s’épanouir à travers ce que nous aimons faire et ce dans quoi nous excellons. Car c’est bien là, le chemin de l’intention : s’aligner avec ses désirs les plus profonds en se connectant à son intelligence créatrice pour les réaliser.
Personnellement, j’ai pu vivre pleinement cette expérience lorsque j’ai pris conscience que je n’étais plus alignée avec le métier que je pratiquais depuis plus de vingt ans et l’environnement qui s’y rattachait. [à lire aussi : Quand tout devient possible ! Un message d’espoir dédié à toutes celles et ceux qui se mettent en mouvement…] Tiraillée par mes émotions négatives, il m'a fallu du temps et de nombreux questionnements pour trouver le chemin vers mon intention. Lorsqu’enfin j’ai eu le déclic de ce qui faisait sens pour moi, je me suis découvert une forme d’intelligence intuitive, comme une boussole intérieure, qui me guidait vers les bonnes décisions, les bonnes personnes… en pleine confiance. J’étais connectée à mon intention !
« Lorsque vous êtes inspiré par un but élevé, tout se met à fonctionner pour vous. […] Ce qui semblait risqué devient une avenue que vous ne pouvez vous empêcher d’explorer. Il n’y a plus de risque, car vous agissez dans la joie. »
En nous connectant à notre intention, nous faisons le choix délibéré de nous sentir bien, de favoriser les pensées qui mettent de bonne humeur et de nous laisser porter par l’énergie de l’enthousiasme et de la passion. En résumé, de renouer avec la joie qui est notre état naturel. Gardons à l'esprit qu'il n’est pas nécessaire d’avoir une raison pour être heureux, le désir de l’être suffit… A fortiori si on prend conscience que nos pensées et nos actions ont également un impact sur les autres. Ainsi, en étant en harmonie avec notre intention, nous devenons un vecteur d’harmonie pour ceux qui nous entourent. Rappelons nous que nous ne sommes pas seuls, que l'on ne peut rien accomplir sans les autres car c'est à travers eux que nous découvrons qui nous sommes... La façon dont nous voyons les autres est une projection de la façon dont nous nous voyons nous-même. Traitons donc les autres comme des co-créateurs de notre intention.
« Dans cet univers où tout est étroitement lié, chaque amélioration que nous apportons dans notre sphère privée améliore le monde dans son ensemble ».
W.Dyer, décrit l'intention à travers sept visages :
Pour se connecter au pouvoir de l'intention, nos émotions et nos comportements doivent être en harmonie avec ces sept visages : créativité, bonté, amour, beauté, expansion, abondance, réceptivité... Un beau chemin de vie !
Je ne sais pas pour vous, mais depuis quelques années, je suis incapable de suivre un débat politique... Que ce soit à la télévision ou à la radio, je me sens rapidement oppressée par ces combats de mots, ces attaques qui fusent, ces allégations dont le seul objectif est de faire poser genou à terre à son adversaire. Une guerre de positions savamment arbitrée par quelques journalistes justiciers qui, pressés par le défilement du temps d’antenne, ne cessent de couper la parole des uns et des autres et de mettre de l’huile sur le feu des divergences… Et dont la finalité, pour chacune des équipes concurrentes, consiste à compter les points afin de porter son candidat en grand gagnant. Comme le diagnostiquait un chroniqueur tout récemment, ces caricatures de débats créent une génération qui va être incapable de supporter la contradiction dans le domaine politique comme dans la vie en général…
Résultat, pour ma part, je zappe ! Encore cette semaine, en route pour le bureau de bon matin, j’écoutais dans ma voiture la chronique radio d’une journaliste qui interviewait un candidat aux élections régionales. En moins de cinq minutes le jeu de question-réponse s’est accéléré et a pris un ton hostile. Dès huit heures le matin, c’était trop pour moi ! Alors, j’ai zappé et cherché un autre programme. J’ai rêvé d’un vrai débat d’idées tiré vers le haut, où chacun peut rebondir sur les propositions de l’autre, dans l’écoute et le respect, et dans l’intelligence collective. J’ai cherché la nuance…
Ce sentiment d’oppression, je l’ai également éprouvé dans le monde du travail, à l’époque où l’on m’exhortait – pour me protéger, bien sûr ! – à « choisir mes batailles », là où j’aurais préféré que l’on m’invite à « engager des conquêtes » ! En qualité de manager, j’ai fini par suffoquer dans cet environnement bipolaire où l’expression des idées est trop souvent étouffée par le ronron de la bienséance. On vous accorde des tribunes pour donner le change mais en réalité, on ne vous entend pas car toute parole divergente est perçue comme dissidente. Alors que se passe-t-il dans ce théâtre de sourds et muets ? Eh bien, on attend… On attend que les voix qui s’époumonent à témoigner de la réalité vécue, s’épuisent jusqu’à l’extinction. On compte sur les réorganisations à répétition pour re-brasser perpétuellement les cartes des insatisfactions du système. On attend que les plans sociaux laissent s’envoler les ressorts cassés. Sans se rendre compte qu’à force de censurer la nuance, on se coupe du réel !
J’ai découvert la notion de « nuance » très récemment dans une émission de radio dédiée à la parution de l’ouvrage de Jean Birnbaum : Le courage de la nuance. Ce livre, dont l’ambition est de « faire du bien », lui a été inspiré par l’œuvre d’Albert Camus et l’idée qu’il exprimait déjà dans les années 50 : « Nous étouffons parmi les gens qui croient avoir absolument raison ». Une sensation qui résonne fortement aujourd’hui encore. Il semble que nous soyons nombreux à ressentir cette tension, sans trop oser le dire d’ailleurs, tant on voit les autres s’engager avec beaucoup de certitudes. C’est pour celles et ceux qui ressentent cette sensation d’étouffement que Jean Birnbaum a écrit ce livre, pour leur donner la force de choisir la nuance… Avec cet ouvrage, il veut apporter du réconfort à toutes les femmes et tous les hommes qui refusent la « brutalisation » de notre débat public et qui veulent préserver l’espace d’une discussion aussi franche qu’argumentée. Pour cela, il renoue avec les textes de quelques intellectuels et écrivains tels qu’Albert Camus, Hannah Arendt, Georges Orwell, Raymond Aron, Georges Bernanos ou encore Roland Barthes, qui nourrissent quelques traits communs : une liberté intraitable, une éthique de la vérité, la conscience de nos limites, le sens de l’humour, un rapport à l’inconscient, une morale du langage, le goût de la franchise, un art de l’amitié… Des textes en dehors du temps, pour retrouver l’espoir et la capacité de proclamer ceci : « dans le brouhaha des évidences, il n’y a pas plus radical que la nuance » !
Alors que je venais tout juste d’achever la lecture de cet inspirant ouvrage, le climat médiatique s’est à nouveau hystérisé autour de la gifle donnée au chef de l’Etat. De l’ensemble des chroniques qui se sont essayées à commenter cet incident, je retiens le témoignage d’Elisabeth Badinter, femme de lettres et philosophe, qui a fait état du chagrin qu’elle a pu éprouver en voyant ces images.
« La société souffre d’une perte du langage. Quand on donne un coup et qu’on se laisse aller à la violence, ça veut dire qu’on n'a plus les mots pour débattre. Ce qui met en cause beaucoup d’institutions et peut-être aussi l’école ».
Selon cette ancienne professeure de lycée, il est du devoir du professeur de tenter d’être le plus neutre et le plus objectif possible devant ses élèves afin qu’ils puissent exercer librement leur esprit critique. Pour Elisabeth Badinter, notre civilisation ne doit pas reculer sur ses principes et notamment le droit de parole. Elle considère que le combat à mener aujourd’hui est celui de l’universalisme.
« Un combat magnifique pour soutenir la réunion et la ressemblance des êtres humains et non pour matérialiser les différences qui nous rendent inaccessibles à l’autre ».
Droit de parole, maîtrise du langage, esprit critique, humanisme… les combats de notre époque résonnent fort avec les invitations à la nuance portées par les héros de Jean Birnbaum, qu’il a souhaité célébrer dans son ouvrage. A leur époque, ces grands témoins ont dressé haut et fort leur liberté critique pour éclairer les esprits. Ils ont choisi la nuance pour exprimer leur pensée et l’écriture comme refuge de leur courage. Je vous propose ici quelques morceaux choisis de ce livre, d’une actualité frappante, que j’ai réunis comme un héritage à préserver, un désir de liberté à raviver, obstinément, comme un guide de bonne conduite pour faire face et se tenir bien dans son langage et dans ses relations…
Hannah Arendt estime qu’il n’y a pas de pensée sans dialogue avec les autres et, pour commencer, avec soi. C’est-à-dire avoir une conscience aux aguets, se montrer capable d’entrer dans une dissidence intérieure. Pour elle, la pensée à moins à voir avec l’intelligence qu’avec le courage. C’est un héroïsme ordinaire : « C’est seulement parce que je peux parler avec les autres que je peux également parler avec moi-même, c’est-à-dire penser ».
Selon Marc Bloch : « Que chacun dise franchement ce qu’il a à dire, la vérité naîtra de ces sincérités convergentes ».
Quant à Georges Orwell, il nous lègue sa conception de la nuance comme franchise obstinée. D’après lui, deux qualités fondent la dignité humaine et peuvent ainsi se mettre en travers de la haine systématique : la capacité à se souvenir et l’art de dialoguer.
Systématiquement, les livres d’Orwell démontrent que la possibilité même de la franchise repose sur deux conditions : disposer d’une mémoire longue et d’un langage libre.
Albert Camus constate : « Aujourd’hui, on dit d’un homme : ‘C’est un homme équilibré’, avec une nuance de dédain. En fait, l’équilibre est un effort et un courage de tous les instants. La société qui aura ce courage est la vraie société de l’avenir ».
L’auteur des Justes cherche en permanence les moyens de préserver, au milieu de la violence, l’espace d’une discussion loyale. Très tôt, cette attitude a impliqué une réflexion sur les corps, leur présence, leur vulnérabilité, et une description de ce qui arrive quand nous faisons face à autrui. Chez lui, l’accueil du visage est la condition de tout lien, de toute responsabilité et de toute justice. C’est cette éthique qui lui permet de penser la possibilité du dialogue et aussi d’affronter ceux qui le refusent : « Quel est le mécanisme de la polémique ? Elle consiste à considérer l’adversaire en ennemi, à le simplifier par conséquent et à refuser de le voir. Celui qui insulte, je ne connais plus la couleur de son regard, ni s’il lui arrive de sourire et de quelle manière. Devenus aux trois quarts aveugles par la grâce de la polémique, nous ne vivons plus parmi des hommes, mais dans un monde de silhouettes » alertait déjà Camus en 1948, et on songe à ce théâtre d’ombres que sont les réseaux sociaux, où la meute anonyme des « trolls » répand la calomnie massive, sans aucun égard pour les noms qu’elle souille, les personnes qu’elle blesse. Camus plaide pour une franchise respectueuse, qui évite de disqualifier l’adversaire.
Sous la lumière de Georges Bernanos, la nuance est un aveuglement surmonté.
Pour Albert Camus, la langue de bois est sécrétée par un cœur en toc. Dans le journal Combat il écrit : « Notre monde n’a pas besoin d’âmes tièdes. Il a besoin de cœurs brûlants qui sachent faire à la modération sa juste place. » Cela implique de peser ses mots. Mais aussi, parfois, de demeurer muet. Quand la sottise infecte les discours, quand les certitudes étouffent toute parole libre, tenir sa langue est la meilleure des parades.
D’après Georges Orwell, ce qui fonde toute émancipation digne de ce nom, c’est la justesse des idées, mais surtout la vérité des sentiments.
Roland Barthes s’est fixé une tâche impossible : non seulement prendre soin des mots, mais encore, ne jamais laisser le langage se figer, toujours le maintenir dans cet état de révolution permanente qu’on appelle littérature.
Il se présente comme un sujet incertain dont l’ambition est de remettre le langage en mouvement. Il voudrait bâtir une parole à la fois enseignante et « hors pouvoir », accueillir cette voix qui fait du savoir une fête, et qui enseigne avec d’autant plus de joie qu’elle lâche prise, renonce à la suprématie, au rapport de force, au chantage.
A la fin de sa vie, Raymond Aaron se réclame d’un ancien professeur de lycée : « Il n’était pas cuirassé par un système, il cherchait tout haut, péniblement, la vérité. […] Le professeur ne savait pas, il cherchait, pas de vérité à transmettre, mais un mode de réflexion à suggérer ».
En ces temps périlleux, choisissons le courage de la nuance : les paroles justes, les discussions fécondes, la recherche du vrai, la possibilité d'un récit partagé, la vérité des sentiments... pour maintenir l'espoir vivant et les rencontres possibles !
A écouter absolument FRANCE INTER - Grand bien vous fasse ! - Les bienfaits de la nuance EUROPE 1 - L'interview politique - Elisabeth Badinter : "On est en train de nous censurer" BRUT - L'importance de la nuance selon Étienne Klein
Ça y est ! Il semble que nous apercevions la lumière au bout du tunnel… Avec le calendrier de levée des restrictions sanitaires, le retour de certaines libertés se dessine enfin. Même si le télétravail reste encore de mise dans les organisations, on peut imaginer retrouver ses collègues, managers, clients, partenaires… que l’on n’a pas croisés physiquement depuis fort longtemps. A la rentrée peut être !
Pour autant, aujourd’hui, beaucoup de dirigeants s’interrogent sur la motivation de leurs collaborateurs à retrouver le chemin du bureau. Car depuis un an, le télétravail s’est installé dans beaucoup d’entreprises et les études montrent qu’il fait maintenant partie du paysage pour la plupart des salariés qui y ont trouvé un certain confort.
Même si cet attrait pour le travail à distance est à relativiser en fonction de la taille de l’entreprise, de l’activité télétravaillée, des conditions d’installation à son domicile…, avec la durée de la crise sanitaire, les salariés ont dû s’adapter et s’approprier de nouvelles pratiques dans lesquelles ils ont pu trouver quelques avantages. Un mode de travail qui leur a notamment permis de gagner en liberté d’action et d‘organisation. A tel point que le retour au bureau soulève des réticences pour nombre d’entre eux !
Alors qu’est ce qui bloque ? Pourquoi certaines personnes rechignent à retourner au bureau tandis que d’autres n’aspirent qu’à retrouver leurs collègues ?
Il faut avouer qu’avec la mise en place du travail à distance dès le premier confinement, les managers ont été contraints d’accroître très tôt l’autonomie de leurs équipes. La responsabilisation de chacun sur ses missions a eu des effets très positifs sur l’organisation du travail et sur le développement des compétences : optimisation des tâches, plus de polyvalence, émergence de nouvelles capacités, rupture des routines professionnelles… Des bénéfices tangibles pour de nombreux salariés qui redoutent de perdre l’autonomie à laquelle ils ont largement goûté pendant plus d’un an et de retrouver la dimension contrôle qu’ils ont pu connaître par le passé.
Ces nouvelles méthodes de travail, qui jouent sur l’autonomie et la responsabilisation des personnes, participent directement à leur épanouissement. En l’espace d’une année, ces habitudes de travail ont eu largement le temps de s’ancrer dans le quotidien, à tel point que notre cerveau les a maintenant adoptées.
Pour le psychanalyste Saverio Tomasella, nous avons tout bêtement perdu l’habitude de supporter les inconvénients du travail : « La perte de l’habitude est très puissante neurologiquement et psychiquement. En télétravail, le cerveau a pris l’habitude de ne plus prendre les transports, de ne plus entendre de bruit en travaillant, de ne plus subir la pression directe des managers, les mauvaises relations avec les collègues... Donc instinctivement, le cerveau refuse de se forcer à travailler de manière moins agréable et moins confortable ».
Cette analyse dépasse la simple opposition entre travail en distanciel ou en présentiel. Il est avant tout question de sens du travail. Car pour donner envie aux collaborateurs de reprendre la direction du bureau, encore faut-il assurer un sens à leur travail. Et c’est là que le bât blesse car selon une enquête récente, pendant la crise, 40% des actifs ont remis en question le sens de leur travail. Un phénomène que nous avons tous observé dès le premier confinement, à travers l’expression d’une certaine confusion chez un grand nombre de salariés tiraillés entre la futilité de certains pans de leur activité et la nécessité soudaine de se concentrer sur l’essentiel…
Et si cet « essentiel » du travail, ce qui fait vraiment sens, devenait le cœur de l’activité au bureau ? Les organisations pourraient ainsi faire du bureau le lieu privilégié d’une nouvelle « expérience », centrée sur la collaboration et l’expérimentation.
Les travaux de M.Morin et B.Cherré (2008) sur l’importance du sens au travail pour promouvoir le bien-être psychologique, l’engagement des employés et prévenir la détresse psychologique, ont permis d’élaborer une liste de six caractéristiques qu’ils considèrent comme les prérequis du sens au travail :
Voici les ingrédients sur lesquels bâtir le sens et l'essentiel du travail, à travers une expérience positive et durable au bureau, qui donne envie aux collaborateurs de se retrouver dans un lieu privilégié et propice à l’émergence d’une nouvelle réalité du travail post-Covid.
Pour tendre vers cette expérience désirable au bureau, il est primordial aujourd’hui pour les dirigeants et leurs managers de prendre le temps d’écouter les ressentis et les besoins de leurs collaborateurs et d’explorer avec eux les attributs de cette nouvelle réalité du travail. Construire ensemble une nouvelle expérience à vivre au quotidien, avec une part en distanciel pour optimiser son temps de production sans les transports, avec des temps réduits de réunions…, à doser selon les capacités individuelles à télétravailler, et une part en présentiel pour développer le sens et « les sens » au travail, avec ses collègues. Faire du bureau un lieu où l’on se sent choyé, stimulé, où l’on renoue avec le plaisir de créer et d’apprendre ensemble.
Chez ACT4 TALENTS, notre espace de coworking dédié au développement humain est un véritable laboratoire des nouvelles aspirations au travail. Notre communauté est constituée pour moitié de salariés d’associations et pour l’autre moitié d’indépendants. Tous ont pratiqué le travail hybride depuis le début de la crise et ont pris leurs marques avec le télétravail. Pour autant, nous observons tous les jours les bénéfices du présentiel pour échanger des idées et créer ensemble ou tout simplement pour partager des moments conviviaux dans notre kitchenette au moment du déjeuner ou au gré d’un café. Il ne se passe pas un jour sans que l’un de nos résidents exprime sa satisfaction de retrouver la dynamique communautaire du coworking après plusieurs jours passés dans le confinement de sa bulle de télétravail.
Evidemment, on peut difficilement comparer le travail dans un espace de coworking et dans une entreprise classique. Quoi que… Commet faire du bureau un espace désirable, humain, vivant et porteur de sens ?
Le retour au bureau doit sonner comme un retour aux libertés fondamentales de travail, celles qui donnent du sens et qui stimulent les sens dans le pouvoir agir. Pour ce faire, les managers ont la responsabilité de créer l’espace pour un dialogue ouvert et sincère dans lequel chacun peut exposer son expérience du travail pendant cette période de crise. Dresser le bilan de ce que l’on a perdu et de ce que l’on a gagné individuellement et collectivement à travers cette épreuve. Tirer les enseignements de ce qui a fonctionné et de ce qui ne fonctionne plus aujourd’hui dans nos pratiques de travail pour construire ensemble un futur souhaitable.
Cette crise sanitaire avec ses contraintes de distanciation sociale nous a amenés à réduire le périmètre du clan professionnel et à privilégier les groupes à taille humaine. L’occasion rêvée pour investir le « moins mais mieux » au bureau, à travers une ambiance chaleureuse et rassurante, une réelle proximité entre les équipes, synonyme d’échanges réguliers, de dialogues profonds, d’une meilleure connaissance des missions de chacun et du développement de l’entraide. Une hiérarchie moins complexe et un processus de prise de décision simplifié sont les garants d’une réactivité optimisée et l’assurance d’une plus grande autonomie pour les collaborateurs.
Pour trancher avec la monotonie du travail à distance, les temps au bureau doivent être ponctués par des séquences pour créer et apprendre ensemble. Stimuler les sens et faire vibrer l’équipe sur de nouveaux challenges, le recours à l’intelligence collective pour lancer de nouveaux projets et des opportunités régulières de déployer le co-développement pour apprendre les uns des autres.
Pour que le bureau redevienne ce lieu privilégié du travail pour tous, dirigeants comme managers doivent s’accorder sur l’expérience qu’ils veulent cultiver pour leurs collaborateurs. Si le modèle de travail hybride semble faire l’unanimité dans cette perspective de sortie de crise sanitaire, les entreprises devront faire preuve de créativité et offrir une alternative désirable au télétravail, synonyme de curiosité, de liberté d’organisation et de dialogue. En faisant du bureau un territoire d’engagement pour vivre ensemble le travail, retrouver la connivence, la convivialité et le lien, essentiels à la coopération.
Quelques lectures inspirantes CADREMPLOI - Saverio Tomasella : « Le cerveau n’est pas toujours d’accord pour retourner au bureau » CHALLENGES - Comment les salariés voient leur retour au bureau post-Covid KANDU - Présentiel et télétravail : une organisation différente, mais complémentaire
Il m’a fallu plus de 20 ans pour comprendre que j’avais choisi le métier de la communication non pas pour développer des outils mais pour créer du lien autour de moi. C’est l’exercice du management qui m’a ouvert les yeux. La responsabilité que porte le manager par son intention, par sa posture et son discours, à donner du sens, à engager ses collaborateurs et à prendre soin de ses interactions avec son équipe. Comme il se doit également d’incarner le modèle de relation qu’il souhaite voir se développer entre ses collaborateurs.
C’est bien là tout l’enjeu de notre société à mon sens. Quels liens voulons-nous tisser avec nos « semblables » ? Ce mot, « semblables », peut paraître désuet mais il me semble traduire qu’au-delà des cultures, des communautés, des statuts, des niveaux hiérarchiques, des classes d’âge…, nous sommes avant tout des êtres sociaux, et à ce titre, nous nous devons de prendre soin les uns des autres dans nos relations interpersonnelles, notamment à travers notre langage. Car le langage est un phénomène social de premier ordre au travers de ses fonctions d’expression et de communication. Il participe ainsi à la sociabilisation de l’individu.
Pour autant, nos modes de vie en accéléré et le tumulte des réseaux sociaux peuvent nous faire perdre de vue la valeur du langage dans nos interactions au quotidien. Comment le choix d’un mot, en fonction de la charge émotionnelle qu’il véhicule, peut faire basculer une relation, une situation, une action… dans une dynamique positive ou négative. Comment une conversation, faute d’attention portée au mode de fonctionnement ou à l’état émotionnel de notre interlocuteur, peut tourner au « combat de mots » et finir dans une impasse…
Comme le souligne Jeanne Bordeau dans son récent ouvrage Le nouveau pouvoir du langage : « La langue de notre époque perd une part de sa chair et se doit d’être courte, brève et péremptoire dans un monde accéléré (…) Vélocité de l’information, diffusion immédiate de concepts grandiloquents, le tout à l’info flash, vient hystériser des informations qu’il faut rendre spectaculaires. Sans hiérarchie, sans cohérence, sans vision, le langage circule dans tous les sens et en devient « in-sensé ».
Le langage est d’autant plus précieux qu’il est vecteur de sens, qu’il donne de la clarté à nos idées pour relier et faire cohabiter des faits et des ressentis profonds souvent paradoxaux.
A travers l’éclairage de Jeanne Bordeau et quelques autres lectures, je vous invite à prendre toute la mesure du pouvoir du langage. Car le langage nous fait exister, par notre compréhension du monde, par l’expression de nos idées, de nos émotions. Et en nous reliant, il nous fait exister aux yeux des autres. Il nous signe, nous dessine et dit qui nous sommes. En créant un monde commun dans le dialogue, le langage est source d’humanité… Cultiver son langage, c’est donc prendre soin de soi et des autres et se projeter dans la relation avec attention et plaisir !
Le langage est nécessaire à la construction de liens sociaux dans le sens où il favorise la communication. Vivre ensemble suppose un minimum d’échanges et de coordination, donc un minimum de communication entre les membres d’une communauté. Le langage permet ainsi d’élaborer un monde commun ; il s’inscrit dans une relation à travers laquelle chacun peut exprimer des pensées, des émotions, des valeurs, des besoins… et partager des informations, des connaissances, des intentions… En cela, le langage est un mode d’accomplissement privilégié car il nous fait exister pour soi et à travers les autres.
Le langage peut donc être fondateur de la société en tant qu’agent de liaison, d’échange et d’intégration. Mais le langage peut également devenir facteur de division, soit de façon inconsciente, en étant source de malentendu ou de maladresse, soit de façon consciente, en devenant un instrument de manipulation, de mensonge et de domination.
Toutefois, quelle que soit l’origine de ces divisions et tensions sociales, elles ne pourront se résoudre que par l’intermédiaire du langage construit sur une véritable éthique de communication fondée sur le dialogue !
Comme l’exprime très justement Abdelbasset Fatih, professeur agrégé de lettres modernes, dans son article Le langage dans la société : « Ce qui fait vraiment de la société un espace humain, ce n’est pas le langage mis au service des appétits de pouvoir et de domination, ce n’est pas le langage qui divise et qui exclut mais le dialogue qui jette les ponts entre les humains ».
Dans son article, Abdelbasset Fatih aime à citer la politologue, philosophe et journaliste Hannah Arendt : « Pour Hannah Arendt, c’est parce qu’ils peuvent parler ensemble sur ce qui les concerne tous que les hommes peuvent partager la même vie et le même monde. Le dialogue est pour elle bien plus qu’une condition de la vie en société, il est un critère majeur d’humanité ».
Pour tendre vers une éthique de la discussion, les interlocuteurs doivent s’accorder sur les critères de réussite du dialogue et sur le fondement de ce dialogue qui les réunit, à savoir la volonté d’entendre ce que dit l’autre et d’accepter ce qui nous sépare : « L’aptitude de dialogue implique le dépassement de l’égocentrisme, du dogmatisme et des préjugés pour tenter d’entendre ce que dit l’autre ». Un dialogue fondé sur le respect et la dignité de chacun.
Cette éthique du dialogue ne se résume pas à un simple échange de paroles. Elle suppose que l’on respecte certaines règles, comme être de bonne foi, écouter, accepter l’objection, être prêt à reconnaître ses erreurs... Car le langage doit permettre la rechercher d’une vérité partagée dans le dialogue. Et pour accéder à cette vérité, il peut être judicieux d’adapter son langage à celui de l’autre pour en favoriser la compréhension mutuelle.
Dans son article intitulé Le langage contribue-t-il à unir ou à diviser les hommes ? Maryvonne Longeart, Docteur en philosophie, souligne : « La parole échangée suppose la recherche d’une vérité partagée et non la pure affirmation dogmatique d’une opinion. Dans l’échange, on est prêt éventuellement à changer de point de vue ».
Elle illustre son propos en reprenant la métaphore de Maurice Merleau-Ponty pour qui « dans l’expérience du dialogue, il se constitue entre autrui et moi un terrain commun, ma pensée et la sienne ne font qu’un seul tissu ». On peut voir ici une référence aux deux fils d’un tissage : la trame et la chaîne ; l’un des interlocuteurs fournit la trame, l’autre la chaîne et la signification commune - le tissu commun - est la résultante des deux.
Pour sa part, Abdelbasset Fatih vise une véritable « esthétique du dialogue. Autrement dit l’art de parler qui consiste à rendre l’échange agréable pour les deux parties. Il s’agit bien ici du plaisir qu’on éprouve en parlant à autrui ou en l’écoutant, car la société des hommes, c’est aussi cela ».
Nous sommes tous familiers de ce dialogue qui tisse des liens et forge la relation. Le plaisir de s’ouvrir à un échange authentique et sincère, dans lequel chacun se sent libre d’incarner son histoire et sa sensibilité, sans phare ni faux semblants. Un dialogue qui s’enrichit des expériences de chacun et qui permet à un langage vivant et en mouvement de rebondir d’une idée à l’autre. Un dialogue prolongé qui ouvre des horizons infinis et stimule le pouvoir d’agir… Car comme le suggère Hannah Arendt : « Les mots justes, trouvés au bon moment, sont de l'action ».
Jeanne Bordeau scrute les métamorphoses du langage dans les entreprises. Pour elle, les évolutions du langage de l’entreprise et de la marque sont éloquentes car elles sont le reflet des transformations sociétales et des nouvelles attentes des « consomm’acteurs ». C’est aussi le langage qui exprime la culture des organisations et façonne leur relation avec l’ensemble de leurs parties prenantes.
Elle voit émerger un langage responsable et attentionné, incarné par des « entreprises qui ont une âme » et qui parlent avec cœur et raison au plus près de l’oreille de leurs clients. Pour adopter le ton juste, elles fondent leur langage sur la « parole source » de leurs équipes et des personnes de métiers et d’expertise. Une « langue de preuve » héritée d’un savoir-faire et d’un savoir-être incarnés, une langue fiable et juste chargée d’une histoire et de la sédimentation d’une culture.
Néanmoins, si le langage des entreprises est aujourd’hui construit pour susciter plaisir et émotion auprès de ses clients, il doit viser les mêmes vertus en interne… Une Symétrie des attentions qui pose comme principe fondamental que la qualité de la relation entre une entreprise et ses clients est symétrique de la qualité de la relation de cette entreprise avec l’ensemble de ses collaborateurs. [à lire aussi : Collaborateur vs Client ? Et si on visait plutôt l’alignement des expériences…] C’est pourquoi, ce langage empreint de justesse et d’attention doit également s’ancrer au cœur de l’entreprise, dans les relations interpersonnelles, en exprimant de l’écoute, de la bienveillance et de la considération. Fort heureusement, les organisations ont pris conscience de l’enjeu de capitaliser sur l’intelligence relationnelle de leurs forces vives en investissant le champ de la communication interpersonnelle. Parce que l’entreprise est un organisme vivant, elle construit sa valeur économique sur les multiples connexions tissées entre ses différentes parties prenantes. Elle a ainsi la capacité à redonner au langage ses lettres de noblesse dans ses rangs. Pour Jeanne Bourdeau : « mieux on maîtrise le langage, mieux l’on va » car formaliser et dire avec justesse libère de ce que nous ressentons et ouvre la voie à des échanges constructifs et sincères.
L’entreprise a également pour mission de cultiver un dialogue de qualité qui prend sa source au cœur du travail. [à lire aussi : Manager, c’est se réapproprier l’essence (les sens) de la communication… et favoriser le dialogue] Donner la parole aux collaborateurs pour débattre des règles, des contraintes, des ressources…de leur activité, c’est les reconnaître dans leur autorité sur leur métier et c’est leur donner le pouvoir d’agir au sein de leur organisation, voire en dehors. Elle a donc un rôle déterminant à jouer pour conforter le « vivre ensemble » qui s'y joue et prendre soin de la qualité du lien social qui s'y noue. Car l’entreprise n’est pas hors de la société, elle est la société !
Cet article est le fruit d’une belle rencontre avec Agnès Mazenc, praticienne et coach certifiée en neurosciences appliquées. Nos chemins se sont croisés juste avant que la Covid-19 ne fasse son apparition. Nous savions alors qu’allait naître une belle collaboration au sein de notre communauté d’acteurs de la transformation sociale ACT4 TALENTS, sans en connaître encore les contours… Près d’une année s’est écoulée. La crise sanitaire s’est installée avec son lot de déconvenues et d’opportunités, d’incertitudes et de prises de conscience. Chacun a cheminé à la lumière de cette nouvelle réalité. Et l’accompagnement proposé par Agnès au sein de la NeuroAcademy se fait encore plus prégnant aujourd’hui pour conduire les transformations individuelles et collectives qui s’invitent dans cette nouvelle réalité. Sa démarche s’est nourrie de sa propre expérimentation : grâce aux neurosciences, s’entraîner à libérer son plein potentiel pour réaliser ses ambitions les plus grandes et tendre vers une performance durable. Agnès accompagne les hauts potentiels (HPE, HPI), sportifs de haut niveau, entrepreneurs et managers qui sont une vraie source d'inspiration pour ces travaux de recherche.
« Au regard des responsabilités qui m’ont été confiées pendant ces 25 années de management d’équipes et de projet, j’ai appris à me montrer forte en toute circonstance. Et puis, un jour, je me suis retrouvée coincée dans une situation inextricable. Cette situation m’a challengée dans ce schéma « sois forte » jusqu’au bout… Jusqu’à ce qu’un matin, je ne puisse plus me lever. C’était le 9 juin 2016. Aussi étrange que cela puisse paraître, dans un contexte où tout semblait s’écrouler, je me suis sentie libérée. Je n’avais alors pas d’autre alternative que de quitter mon entreprise ; pour autant, j’ai accueilli ce départ comme un cadeau. Pendant 6 mois, j’ai pris soin de moi. J’ai fait beaucoup de sport, et j’ai cheminé en toute liberté, en laissant parler mes envies. Sans le savoir, j’ai mis en route une rééducation cérébrale dont les effets sur mon bien-être et ma créativité allaient être époustouflants ! C’est en cherchant d’où provenait cette libération émotionnelle que j’ai compris qu’il s’était passé quelque chose dans mon cerveau. Mon appétence pour les sciences et les signes de la vie – je crois aux synchronicités ! – ont fait le reste. Je me suis laissée guidée et au fil de rencontres, de lectures, de mes recherches, je me suis tout naturellement orientée vers les neurosciences. Une discipline qui donne à voir les processus issus du cerveau. Une découverte pour quelqu’un comme moi, qui pendant toute sa carrière s’est intéressée aux processus. J’ai alors décidé de suivre la formation de « praticien certifié en neurosciences appliquées » délivrée par le neuroscientifique canadien Mario Beauregard. »
« J’ai découvert la neuroplasticité : la capacité du système nerveux à se modeler et à se réorganiser lorsqu’il subit un changement. Notre cerveau est comparable à un ordinateur, constitué de hardware (structure cérébrale et neuronale), de software (programmes qui organisent nos pensées, émotions et comportements) et de stockage des données (mémoires et croyances). Toutefois, le cerveau a de singulier qu’il modifie en permanence sa structure et ses programmes, au gré de nos expériences et de nos apprentissages.
Ça a été un véritable « waouh » ! Tout devenait possible. J’ai compris, que comme pour une radio, si on se branchait sur la bonne fréquence de son cerveau, on pouvait choisir le programme aligné avec nos envies. Et lorsque le programme ne nous convient plus, nous pouvons changer de fréquence… La clé est de tenir compte des indicateurs que sont nos pensées et nos émotions pour prendre conscience du changement à engager et d’aborder cette transformation avec discipline et plaisir. Car la bonne nouvelle, c’est que le cerveau apprend par le plaisir ! Les neurosciences nous offrent la liberté de choisir le changement lorsque nous le décidons plutôt que d’être en réaction face à notre environnement ou d’attendre une situation de crise pour se transformer. »
« J’aime parler de « rééduquer notre mindset » pour illustrer l’importance de manager nos neurones lorsque l’on éprouve le besoin de se transformer durablement. Pour traiter nos 60 000 pensées journalières, le cerveau a deux circuits d’exploitation : un circuit automatique avec des programmes alimentés par notre hérédité, nos expériences et apprentissages passés, et un circuit adaptatif utilisé pour intégrer les nouveaux apprentissages et corriger les modes de fonctionnement qui ne sont plus adaptés pour réaliser nos objectifs. Par défaut, nous faisons confiance à notre système automatique. Mais nous devons garder à l’esprit que ce mode est celui du passé, et que dans une perspective de changement, il est de notre responsabilité de sortir du mode automatique pour passer en mode adaptatif.
On s’engage alors dans un véritable processus d’amélioration continue de notre base de données cérébrale. Ceci passe par une rééducation de notre mode de pensée et par le renforcement de notre intelligence émotionnelle. Nos pensées sont des stimuli électriques qui déclenchent des réactions chimiques (à la base de nos émotions) et des actions (à la base de nos comportements). Nos pensées créent ainsi notre réalité : ce que nous ressentons et vivons ou la représentation que nous nous en faisons. Changer notre réalité revient donc à changer nos pensées. Pour cela, nos émotions sont des indicateurs bien utiles, puisqu’elles sont la traduction chimique de nos pensées. Avouons qu’il est plus facile d’observer nos émotions que nos pensées ! C’est là que l’intelligence émotionnelle joue un rôle déterminant car elle nous permet d’observer en conscience nos émotions, d’en comprendre le message, de décoder le programme ayant créé la pensée (nos croyances et nos mémoires) pour le mettre à jour le cas échéant.
C’est au prix de répétitions et d’entrainement que nous pouvons abandonner ces informations périmées pour ancrer une nouvelle façon de penser. Rien ne résiste à la répétition car le cerveau apprend et désapprend par la répétition. Comme pour l’entraînement sportif, entraîner son cerveau revient à pratiquer des exercices réguliers et en conscience pour entretenir et améliorer ses performances. »
« Pour conserver le parallèle avec le sport, je dirais que pour prendre conscience de la justesse de ses mouvements et des éventuels besoins de correction, l’effet miroir est important. Soit on se corrige devant un miroir, soit à travers les conseils d’un entraîneur. Il en va de même pour le cerveau. Personnellement, pour accompagner la haute performance, j’utilise le neuro-coaching et aussi le neurofeedback, un outil d’apprentissage et d’entraînement qui appréhende l’activité électrique du cerveau comme un ensemble d’ondes que l’on peut entraîner et développer à partir du moment où l’on dispose d’un retour (feedback) et donc d’une boucle d’apprentissage. Le neurofeedback est beaucoup utilisé en Amérique du Nord, à des fins thérapeutiques, mais aussi par des sportifs de haut niveau et des CEO. Pour rendre tangible notre activité cérébrale, je réalise tout d’abord une « échographie » de nos ondes cérébrales à l’aide d’un moniteur et logiciel de neurofeedback, le Mind Mirror. Ce dispositif est né des travaux des chercheurs américains Anna Wise et Maxwell Cade, qui ont étudié le profil des ondes cérébrales de sportifs de haut niveau, de CEO et d’artistes afin de modéliser un profil type des ondes cérébrales de ces esprits performants et un protocole d’entrainement vers la haute performance. Il permet à une personne de visualiser les ondes de son cerveau au cours d’une tâche et de mettre en œuvre un entrainement personnalisé pour installer cette symphonie d’ondes, clé de la haute performance. Le Mind Mirror mesure les ondes cérébrales et la cohérence cardiaque. On l’utilise pour la gestion du stress, le développement de l’intuition et de la créativité. Il a reçu, aux Etats-Unis, en 2016 et 2017, le prix Transtech pour sa contribution innovante et scientifique à la santé mentale et émotionnelle de l’humanité.
Les potentialités de ce dispositif sont particulièrement intéressantes pour le monde de l’entreprise et le neuromanagement que j’envisage comme un processus en 3 temps. La première étape invite à mieux se connaître : comprendre ses mécanismes cérébraux et prendre conscience de sa responsabilité et de son pouvoir dans la réalisation de ses objectifs personnels. La deuxième étape met en mouvement pour mieux se transformer grâce à une feuille de route visant à libérer ses blocages et son potentiel, les deux faces d’une même médaille, au service de la réalisation d’un « super » objectif. La troisième et ultime étape conduit à mieux transformer autour de soi, à être un vecteur inspirant de transformation collective, à polliniser le bien-être et la performance au travers de la créativité et de la coopération. C’est un cercle vertueux. »
« Ce parcours, baptisé « Brain training », est dédié aux personnes à haute responsabilité, dirigeants, top-managers, qui souhaitent, tout comme un grand sportif, s’entrainer pour améliorer leurs capacités mentales et émotionnelles : avoir une vision claire sur les prises de décision, accroître sa créativité, développer son intelligence émotionnelle, relationnelle et situationnelle, optimiser sa dépense d’énergie, améliorer sa santé mentale et physique.
Une opportunité unique et exaltante de devenir l’architecte de son cerveau pour maîtriser sa réalisation et ses performances en toute conscience ! »
A l’aube de cette nouvelle année, je peux clairement affirmer que ne me suis jamais sentie autant exister ! L’année qui vient de s’écouler, aussi singulière qu’elle ait été, a agi sur moi comme un véritable révélateur. Comme si quelqu’un avait ouvert en grand les vannes de mon subconscient et avait libéré des capacités enfouies que je n’avais jamais jusqu’ici eu l’audace d’explorer. Comme si j’avais enfin trouvé la clé pour me connecter à moi-même. Comme si soudain, tout devenait possible et que l’univers s’ouvrait devant moi, que les planètes s’alignaient et m’invitaient à m’accomplir dans une mission fondamentale, pour moi, bien sûr, mais surtout, une mission dont je puisse partager le sens avec d’autres. En entraînant une communauté de valeurs et de vision avec qui construire un projet plus grand que moi.
Car en l’espace d’une année, j’ai croisé la route de nombreuses personnes qui, comme moi, ont éprouvé l’urgence d’une transformation profonde et durable pour assouvir leur besoin de se réaliser. Une prise de conscience révélée par l’épidémie de Covid-19 et activée par le désordre hérité de cette crise inédite. Un chaos qui a profondément bousculé nos certitudes, ébranlé nos habitudes et fait émerger de nouvelles manières de vivre ensemble. Et lorsque je regarde en arrière, j’observe que cette crise, tel un tsunami, a libéré une vague d’humanité exceptionnelle !
Ce phénomène m’a donné envie de comprendre quel processus amenait un individu à enclencher une transformation profonde et vitale. Et à la lumière de ma propre expérience, dérouler la trajectoire d’une transformation personnelle qui allait prendre un tournant collectif.
Alors, êtes-vous prêt.e pour ce rendez-vous avec vous-même ? Quand tout devient possible…
Nous sommes au printemps 2019 et depuis quelques années, trop sans doute, j’ai l’impression que quoi que j’entreprenne dans mon activité professionnelle, je finis toujours par me fracasser contre un mur. J’utilise le mot « fracasser » à dessein car au fil des ans, l’impact contre le mur se fait de plus en plus violent. Et donc, naturellement, à force de prendre des murs, on se blesse. Une blessure qui atteint d'abord le psychologique et qui finit par frapper le physique. Elle est le fruit d’une frustration qui, gonflée jusqu’à l’implosion, atteint les moindres recoins de la confiance en soi et freine l’élan des plus engagé.es.
Baisse des ressources, défaut de stratégie, déficience managériale… peu importe la cause, le résultat est là, l’impression de régresser et que personne ne peut rien pour vous, pas même vous ! Car c’est là que la machine s’enraye. Bloqué.e dans vos prérogatives à l’intérieur de l’organisation, votre système de défense vous incite à en sortir et à tendre vers de nouvelles opportunités. Mais là encore, l’horizon semble bouché. Trop typé.e, trop cher.e, réduit.e à un métier saturé… Avec comme corollaire, la difficulté à se projeter vers un projet professionnel nouveau. Et c’est bien là le drame ! Quand on se trouve enfermé.e dans un cadre trop étroit depuis trop longtemps, on peine à s’imaginer à l’extérieur du cadre. Donc, rien ne se passe ni dedans, ni dehors. Alors, vous remplissez le vide en faisant le plein. Le plein d’activité pour vous rendre utile, à défaut d’être épanoui.e. Et comme un hamster dans sa roue, vous vous étourdissez jusqu’à l’épuisement. C’est à ce moment que la blessure physique apparaît. Elle peut prendre différentes formes : insomnies, maux divers, manque d’appétit… On l’appelle burn-out ; un terme hérité de l’aérospatial, qui désigne une fusée au décollage dont le carburant vient à s’épuiser avec comme conséquence la surchauffe du moteur et l’explosion de l’engin. Nous voilà donc rendus au chaos que j’évoquais plus haut, celui qui se manifeste juste après l’explosion.
Il s’agit là de chocs auxquels nous soumet la vie, à titre professionnel ou privé. Des épreuves plus ou moins violentes qui font bouger nos lignes et remettent en question nos certitudes. Ils créent une sorte de séisme intérieur qui irradie jusqu’à l’extérieur et bouscule notre écosystème. Ces chocs sont tels des marqueurs qui jalonnent le développement de chaque individu, comme le symbolise l’ennéagramme introduit par le philosophe et ésotériste Georges I. Gurdjieff au début du XXème siècle. Gurdijieff pensait qu'il était possible de passer à un état supérieur de conscience et d'atteindre le plein potentiel humain. Son ennéagramme symbolise ainsi la dynamique du développement de l’individu et son passage d’une étape à une autre. Il nous guide vers l’étape ultime : « qui nous sommes véritablement » !
L’ennéagramme est composé de sept niveaux et de deux chocs qui tout en étant indépendants, se complètent et contribuent au développement de la personne. Ces deux chocs sont la source de la transformation humaine. Ils participent simultanément à notre déconstruction par la remise en cause de notre nature humaine et à notre construction par l’énergie qu’ils nous apportent. Le premier choc, qui survient par surprise est très déstabilisateur. Vécu comme un traumatisme, il permet d’entreprendre un travail sur soi pour sortir de cette perturbation. A ce stade, l’individu cherche à mieux comprendre le but de son existence et par le fruit d’une réflexion personnelle amorce une première transformation. Le deuxième choc intervient alors qu’un travail de développement personnel a déjà été entamé. Il fait suite à l’acquisition de connaissances permettant de vivre de nouvelles expériences et ainsi, engendre des modifications profondes dans notre personnalité pouvant conduire à un état de « pleine conscience » proche de la réalisation de soi.
Personnellement, ces deux chocs se sont matérialisés très distinctement. Le premier, de façon totalement inattendue et avec une grande violence. Il a irradié longtemps mon environnement professionnel comme personnel, laissant derrière lui une faille béante. Jusqu’au second choc, dix ans plus tard, comme l’aboutissement d’une transformation inéluctable, avec à la clé un changement de vie professionnelle parfaitement assumé. Il s’est suffi d’un déclic, un fait loin d’être anodin, la suppression d’un poste au sein de mon équipe pour que tout devienne évident. Avec un collaborateur en moins, le hamster dans sa roue courait à sa perte. Il fallait sortir de cette situation, c’était une question de survie. Ce déclic a enclenché une sorte de reset au niveau de mon cerveau avec à la clé un grand vide... C'est ce grand vide qui a permis de faire émerger des solutions nouvelles en me libérant de mes modèles mentaux et de mes croyances auto-limitantes les plus profondes. Tout en débloquant un « pouvoir d’agir » que je n’avais encore jamais expérimenté. Comme si j’avais prononcé la formule magique qui laissait enfin libre court à mon énergie créative.
Dans son ouvrage Renaître chaque jour, l’auteur et orateur indien Jiddu Krishnamurti l’évoque ainsi : « La création ne peut se produire qu’en présence d’une énergie jamais entachée de volonté, qui n’est pas le résultat de l’effort, une énergie que l’action elle-même fait naître. »
J’ai compris soudain que je ne devais pas changer de métier mais changer ma façon d’appréhender mon métier. J’ai surtout compris que, si j’avais choisi de mener une carrière dans la communication, ça n’était pas pour me perdre dans une vision de plus en plus instrumentalisée de mon activité mais pour créer du lien entre les gens, favoriser le dialogue et ainsi contribuer à bonifier les relations entre les individus. Une révélation ! J’avais trouvé mon objectif supérieur et les clés de ce changement étaient entre mes mains…
Le changement personnel s’opère dans une tension entre l’idéal et le réel. Lorsque cet alignement avec notre personnalité profonde se matérialise enfin, l’incarnation de notre idéal nous donne des ailes pour nous transcender et dépasser les obstacles. Nous libérons alors une forme d’intelligence intuitive, comme une boussole intérieure, qui nous guide vers les bonnes décisions, les bonnes personnes…
Pour la neurologue Régine Zékri-Hurstel, auteure avec le philosophe du goût Jacques Puisais du Temps du goût : « notre intuition est connectée à notre banque de données sensorielles, toujours en mouvement, et s’adapte en permanence pour percevoir le moindre changement. Les plus intuitifs sont donc ceux qui ont le mieux développé leurs qualités sensorielles. L’émotion vient des sens, elle est essentielle dans la capacité intuitive ».
Les chocs et le chaos qui en a résulté ont mis tous mes sens en éveil. Et ont fait voler en éclat bon nombre de peurs, notamment la croyance selon laquelle je n’étais pas faite pour l’entrepreneuriat. J’ai été gagnée par une confiance et une audace que je ne me connaissais pas, portée par une certitude fulgurante qui m’attirait, comme un aimant dans la bonne direction et vers les bonnes personnes. A ce stade de mon développement, les rencontres ont été déterminantes.
C’est à ce moment-là que la Covid-19 a fait son apparition début 2020. D’abord comme une ombre qui planait au-dessus de nos têtes, nous laissant avancer dans nos projets avec insouciance. Stimulée par l’énergie créatrice qui m’habitait alors, j’ai croisé la route de personnes très inspirantes. Ces rencontres ont été vibrantes d’émotions tant nous parlions le même langage et partagions les mêmes aspirations.
Très vite, nous avons exprimé l’envie de construire ensemble pour avoir un impact sur le reste du monde en nous mettant au service de l’humain et de la transformation sociale. Nos énergies associées ont ainsi donné à notre entreprise un élan et une résonnance incroyables qui se sont trouvés freinés brutalement avec l’annonce du confinement. Une crise inédite dans sa nature et dans l’amplitude de son impact qui a révélé chez nombre d’individus des réalités inhibées et a débloqué des ressources jusqu’alors inexploitées.
Face à ce système complexe dans lequel nous a enfermé la crise, nous avons pu activer notre esprit critique et notre créativité pour ajuster nos connaissances à cette nouvelle réalité et développer des comportements adaptés.
Nous avons appris de ces perturbations comment percevoir les développements possibles ou souhaitables, « utiliser les forces du changement au lieu de leur résister », comme nous y invite l’auteur et directeur du Center for Organizational Learning du MIT Peter Senge.
Et profiter de cette épidémie, où la préservation de l’humain est au centre des préoccupations, pour transformer nos environnements de travail en espaces de liberté propices à l’observation, l’imagination, la création, l’expérimentation…
Un terreau idéal pour se réinventer et entraîner dans notre sillon un collectif d’acteurs à la fois diversifié et relié par une aspiration profonde à faire bouger les lignes. Cette crise, comme un accélérateur de changement, a fait émerger des « communautés restauratrices », centrées sur un idéal à construire collectivement et mobilisant des énergies incroyables au bénéfice d’une mission transcendante pour remettre l’humain au cœur des organisations. Dans un monde fragilisé par l’épidémie de Covid-19, en perte de repères et poussant à l’individualisme, ces communautés ont permis à de très nombreux individus de trouver du sens, de générer de l’engagement et d’offrir de la solidarité. Elles ont pris des formes très évoluées d’organisations humaines et se sont maillées bien au-delà de leurs missions et espaces géographiques pour partager l’entraide et la connaissance. Résilientes, résolument ouvertes, bienveillantes et fraternelles, elles sont le présent et l’avenir de la réalisation des individus et des organisations.
Génératrices de coopérations, d’idées nouvelles et d’innovations, elles augmentent le champ des possibles et se déploient dans une perspective utilitaire. Aussi anciennes que l’humanité, elles marquent aujourd’hui encore l’histoire du développement des individus et contribuent tous les jours à la création d’un nouveau monde. Un monde où tout devient possible…